Le tribunal administratif de Caen a rendu sa décision finale le 20 avril. Le service des urgences de l’hôpital de Valognes, dans le département de la Manche, ne rouvrira pas. Le recours commun des collectivités locales, de l’Association de défense du Centre Hospitalier Public du Cotentin (CHPC) et de promotion de la santé, et de la CGT pour la suspension et l’annulation de sa fermeture a donc échoué.
Rémi Besselièvre, président de l’association, joint par Pourquoidocteur, ne semble pas surpris par la décision, mais critique les arguments du débat. « Le tribunal n’a pas répondu à la question que nous posions qui était : "est ce qu’il y a une insécurité sanitaire causée par la fermeture des
urgences ?". Le tribunal n’a pas appuyé sa décision en termes juridiques sur la mise en danger, mais sur le plan politique en disant qu’il n’y a pas assez de médecins pour faire tourner le service. »
« Dégradation de la qualité de soins »
Par sa décision rendue le 20 avril, le juge confirme en effet que la décision a été prise dans le strict respect des règles de droit et était justifiée par la réalité démontrée de la pénurie de médecins. Le service d’urgences avait fermé ses portes le 6 août 2015, suite à une décision de l’Agence régionale de santé (ARS) de Basse-Normandie sur ce motif.
Dès le 10 septembre 2015, le juge des référés estimait que l’urgence à suspendre l’exécution de la décision de fermeture n’était pas établie et qu’une réouverture des urgences de Valognes ne pourrait s’effectuer « sans une dégradation de la qualité des soins et de la sécurité des patients, incompatible avec les exigences de santé publique ».
Une alternative insuffisante
Le service fermé, les urgences vitales sont reportées dur l’hôpital de Cherbourg. Pour les urgences non vitales, un Centre de soins non programmés (CSNP) a ouvert au début du mois de mars en lieu et place du service d’urgences. Il est appuyé par le SMUR de Valognes, opérant 24h/24. Une offre de soins d’urgence insuffisante, selon Rémi Besselièvre.
« Cette réponse n’est que partielle, explique-t-il. Le CSNP n’est ouvert que jusqu’à 18h 30, et fermé pendant les vacances scolaires ! Il faudrait dans un premier temps qu’il ouvre au moins jusqu’à minuit. Ces horaires ont été fixées suite à un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), qui avait estimé qu’après 20h, le nombre de consultations était considérablement réduit. Mais il ne s’agissait en fait que de l’arrivée aux urgences, pas de la prise en charge, qui peut être bien plus tardive. »
Un coût humain de la désertification
Les conséquences de la fermeture n’ont pas tardé. « Un homme âgé est décédé d’un infarctus à son arrivée à l’hôpital de Caen, car sa femme hésitait à faire la route de nuit, et le couple a préféré reporter l’admission au matin », déplore le président d’association.
Mais sur le plan juridique, Rémi Besselièvre semble résigné quant aux possibilités d’action. « On perd notre temps dans les recours. Dans des cas similaires, les décisions qui sont favorables aux associations citoyennes ne sont de toutes façons pas respectées ».
Il préfère se concentrer sur la mise en place d’un rapport de force avec les institutions, en faisant grandir la mobilisation afin que les élus ne puissent plus les ignorer.
L’Association de défense du CHPC et de promotion de la santé prépare une action pendant le passage du tour de France 2016, qui sera pendant trois jours dans la région. Une vitrine médiatique pour leur combat. « C’est l’occasion pour nous, mais aussi pour les paysans, les enseignants et d’autres associations citoyennes d’exprimer le désespoir des habitants de cette région qui ce désertifie sur le plan médical mais pas uniquement… »