Dans un rapport rendu public mercredi, la Cour des comptes estimait que « l'imagerie médicale se situe au cœur du diagnostic et du suivi thérapeutique. […] Sa bonne organisation conditionne pour partie la qualité de prise en charge des patients, en ville comme en établissements de santé », ajoutait-elle.
Mais dans ce document de 163 pages, les sages de la rue Cambon (Paris) ont fait aussi un véritable réquisitoire sur les fortes inégalités géographiques en la matière.
Ils critiquent tout d'abord la répartition départementale des médecins radiologues et des médecins nucléaires « très inégale ». La densité moyenne de médecins radiologues est de 13 pour 100 000 habitants. Les quatre départements les moins bien dotés sont Mayotte (1,9), le Cantal (4,8), la Creuse (5) et l’Eure (5,2). Les quatre départements les mieux pourvus sont les Hauts-de-Seine (18,7), l’Hérault (18,9), les Alpes-Maritimes (20,1) et Paris (34,8).
Si l’on fait abstraction de Paris dont les hôpitaux accueillent, dans certaines spécialités, des patients de tout le territoire, l’écart de densité est de 1 à 10.
La Haut-Saône manque d'équipements
Autre inquiétude de la Cour des comptes, les variations des taux d’équipement qui sont « encore plus accusées par département ». Ainsi, la Haute-Saône compte un seul équipement d’IRM pour 250 000 habitants (soit 4,17 IRM pour un million d’habitants) contre une IRM pour moins de 40 000 habitants à Paris (27,66 IRM pour un million d’habitants).
Et certains territoires généralement considérés comme attractifs (Alpes-Maritimes ou Loire-Atlantique avec environ 10 IRM) présentent des densités très inférieures à la moyenne nationale, alors que des départements ruraux (Vienne ou Haute-Marne avec plus de 16 IRM) affichent des densités supérieures.
« Ces fortes disparités ne semblent correspondre à aucune situation objectivée en termes de besoins de santé », précisent les auteurs des travaux.
61 jours d'attente pour un RDV d'IRM en Alsace
Enfin, les Sages rapportent que les tendances observées par la DREES (1) ont été corroborées par l’étude annuelle réalisée pour l’association Imagerie Santé Avenir (ISA) par le cabinet CemkaEval. Sur la période 2004-2015, le délai moyen d’obtention d’un rendez-vous d’IRM s’est certes réduit de près de 6 jours (- 16 %) passant de 36 jours à 30,3 jours, mais il varie fortement d’une région à l’autre : 19,7 jours en Île-de-France contre 61,2 jours en Alsace en 2015.
Des économies « inacceptables », selon les radiologues
Dans un communiqué publié ce mercredi, la Fédération Nationale des Médecins Radiologues (FNMR) se félicite que la Cour reconnaisse que « l'imagerie médicale se situe au cœur du diagnostic et du suivi thérapeutique ». Mais au-delà du constat, le suivi des recommandations du rapport se traduirait par une nouvelle étape dans la dégradation de l'offre d'imagerie, déplore la Fédération.
Ces radiologues rappellent en effet que la Cour recommande 460 millions de nouvelles économies pour, selon eux, « financer l'innovation en imagerie et rendre plus attractif le secteur hospitalier pour les jeunes médecins ». Sauf que, pour la Fédération, ces recettes ont déjà été mises en oeuvre ces dernières années, à hauteur de 900 millions, avec comme conséquences : « des dizaines de cabinets libéraux de proximité fermés, le dépistage organisé du cancer du sein menacé dans les villes et les quartiers où ont eu lieu ces fermetures, un scanner sur 5 en déficit - ce qui montre que l'imagerie en coupe n'est pas une "rente" comme l'écrit la Cour - des difficultés financières accrues pour les services d'imagerie des hôpitaux », écrit-elle.
« Cette nouvelle demande d’économies, irréaliste, inacceptable, va à l’encontre d’une modernisation des plateaux d’imagerie alors que le nombre de malades chroniques notamment atteint de cancer, d'AVC, etc. et le vieillissement de la population justifient le développement des plateaux d’imagerie médicale coordonnée », conclut la FNMR.
(1) Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques