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Sécurité routière

Seniors au volant : prévenir plutôt qu’interdire

Par Afsané Sabouhi

Une visite médicale obligatoire pour évaluer l’aptitude des seniors au permis de conduire serait inefficace, jugent les spécialistes. D'ailleurs, les plus de 65 ans n’ont pas plus d’accidents que les autres. 

GILE/SIPA

Plus lents, plus distraits, moins réactifs… Et pourtant, non, senior au volant ne rime pas avec mort au tournant. Les assureurs en témoignent, lD'ailleurs L’Observatoire national interministériel de la sécurité routière note tout de même que les personnes âgées de plus de 75 ans sont responsables des accidents mortels qui les impliquent dans 66% des cas, à peine moins que les jeunes conducteurs (69%).

La question d’imposer aux conducteurs seniors un examen régulier de leur aptitude à prendre le volant refait surface à chaque accident dramatique. Mais les spécialistes, réunis hier et aujourd’hui à Paris dans le cadre du congrès Route et Médecine 2012, sont peu favorables à ce principe de contrôle. « L’urgence en matière de sécurité routière n’est pas là, souligne le Dr Philippe Lauwick, président de l’Automobile-club médical de France. Ce serait extrêmement lourd et coûteux à mettre en place pour un gain de vies sauvées proches de 0, si l’on en juge par les expériences des pays nordiques ».
Certaines personnes âgées font déjà l’objet d’un contrôle médical de leur aptitude à la conduite, mais pas en raison de leur âge mais d’une pathologie. L’épilepsie, le diabète ou encore certaines pathologies cardiaques nécessitent une réévaluation régulière par un médecin agréé par la Préfecture pour pouvoir garder son permis.

Ecoutez le Dr Michel Avisse, président de l’association des médecins agréés pour le contrôle médical de l’aptitude à la conduite : « Où va-t-on placer le curseur personne âgée ? »



« Ne plus être en capacité de conduire lorsqu’on vit en province, c’est la mort sociale. Du coup, c’est un levier très puissant pour inciter nos patients à se prendre en charge, assure le Dr Philippe Lauwick. Pour éviter d’en arriver là, il faut contrôler sa glycémie et faire surveiller sa rétine lorsqu’on est une personne âgée diabétique, faire soigner son apnée du sommeil… ».
Plutôt que d’instaurer des contrôles d’aptitude réguliers, les experts français privilégient donc une prévention plus active, notamment par les médecins de famille. « Est-ce que vous conduisez toujours ? Est-ce que vous avez encore tous vos points de bonus ? Par des questions très simples, le médecin généraliste peut engager une discussion très utile avec son malade », raconte le Dr Lauwick.

Ecoutez le Dr Michel Avisse : « Au début d’un traitement, avant une opération des yeux, la prévention passe mieux si elle vient de son médecin »



Les spécialistes reconnaissent toutefois que cette démarche préventive s’avère insuffisante en cas de déficit cognitif comme la maladie d’Alzheimer. « La réduction des capacités attentionnelles est progressive et moins perceptible qu’une diminution du champ visuel ou un rhumatisme bloquant la mobilité du cou », explique le Dr Bernard Laumon, directeur de recherche à l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux.
Le concours des familles peut alors être très utile mais elles hésitent encore souvent à aborder la question avec le médecin de leur proche. A tort, car la parole du médecin porte selon une étude canadienne publiée le mois dernier dans le New England Journal of Medicine. Les seniors mis en garde à plusieurs reprises par leur médecin sur l’incompatibilité de leur état de santé avec la prise du volant avaient un risque d’accident réduit de 45%.