La cigarette électronique n’est pas une porte d’entrée vers le tabac. C’est ce que suggèrent les premiers résultats de la cohorte française Constances, qui suit 24 157 personnes. Parus dans le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, édité par Santé Publique France, ils montrent que le vapotage est rare chez les non-fumeurs : seuls 11 s’y adonnent. Après un an de suivi, aucun d’entre eux ne s’est tourné vers la cigarette classique. Les autres modes de consommation sont en revanche instables.
Des fumeurs adeptes de la vape
La consommation de tabac et de cigarette électronique sont sous-représentés dans cette cohorte, soulignent les auteurs de l’étude : seuls 13 % des participants de la cohorte sont fumeurs, contre 34 % dans les enquêtes habituelles. De même, la consommation exclusive d’e-cigarette concerne 1 % des anciens fumeurs et 2 % des fumeurs actuels. Soit un total de 3 % contre 6 % dans l’enquête Etincel. « Cette sous-représentation des vapoteurs dans Constances est cohérente avec celle des fumeurs, dans la mesure où l’usage de la e-cigarette est fortement associé à celui du tabac », analysent les chercheurs.
En fait, le recours au vapotage augmente en fonction du nombre de paquets-année qui sont fumés par les participants de la cohorte, et ce dans les différentes classes d’âge. En moyenne, 15 % des fumeurs sont aussi adeptes de la cigarette électronique. Chez les anciens fumeurs, ils sont 2,8 %.
Un état de santé variable
L’équipe de l’Inserm, qui signe ces travaux, signale que la vape est moins fréquente chez les fumeurs les plus jeunes et les plus âgés. Les personnes en sevrage, de leur côté, ont un recours plus homogène à ces dispositifs jusqu’à l’âge de 49 ans. Il recule ensuite.
L’usage dit « mixte », lorsque le tabac et la cigarette électronique sont cumulés, se retrouve plus souvent chez les employés et les ouvriers que les cadres et les professions intermédiaires. Cette habitude de consommation a un impact non négligeable sur l’état de santé perçu : ce sont les personnes qui mélangent cigarettes traditionnelles et électroniques qui se jugent le moins en bonne santé.
Source : Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire
La consommation d’e-cigarette se caractérise par sa volatilité au vu des résultats. Parmi les vapoteurs en sevrage tabagique, 11 % ont abandonné la vape et sont retournés vers le tabac, 24 % se sont totalement sevrés et 11 % sont retournés vers une consommation mixte.
Chez les personnes qui ont opté dès le départ pour une alternance e-cigarette et tabac, le bilan n’est pas meilleur : la moitié a abandonné le vape et continué à fumer, 8 % ont tout arrêté et 5 % ont choisi d’abandonner le tabac.
Un Européen sur deux méfiant
La cigarette électronique connaît un vrai boom dans l’ensemble de l’Europe. Des chercheurs de l’Imperial College de Londres (Royaume-Uni) ont passé au crible les réponses aux deux Eurobaromètres dédiés au tabac. Les résultats, parus dans Tobacco Control, montre qu’entre 2012 et 2014, le nombre de personnes qui ont adopté l’e-cigarette a presque doublé au Royaume-Uni. Ceux qui l’ont expérimentée sont trois fois plus nombreux.
Au sein de l’Union européenne, les consommations restent disparates : alors que 21,3 % des Français ont testé la vape, seuls 5,7 % des Portugais se sont laissés tenter. Le fait d’être jeune, fumeur ou ancien fumeur, de vivre en zone urbaine et d’avoir fait de hautes études est associé à une plus forte probabilité de vapoter.
Mais la méfiance vis-à-vis des dispositifs de vapotage aussi a augmenté : en 2 ans, la part d’Européens défiants est passée de 27 à 51 %.