Présenté la semaine dernière par le CNOM (1), l’Atlas 2016 de la démographie médicale insistait sur la baisse « préoccupante » des effectifs de médecins généralistes, premiers touchés par le nombre important de départs en retraite. Depuis 2007, leur nombre a ainsi diminué de 8,4 %. Cette baisse pourrait même se traduire par la perte d’un omnipraticien sur quatre pour la période 2007-2025 ! Malgré ce contexte morose, la profession ne perd pas espoir.
C'est sous le thème « Dessine moi la médecine générale de demain » que le premier syndicat de généralistes, MG France, se réunit ce week-end à Grenoble pour son Congrès national organisé tous les 3 ans. De vendredi à samedi, l'évènement sera l’occasion de fêter les 30 années de combat de l'organisation. Son président, le Dr Claude Leicher, en profitera aussi pour régler ses comptes avec le gouvernement.
Contacté par Pourquoidocteur, il dénonce « l'inaction » de Marisol Touraine durant son quinquennat. Prise à New York pour la réunion de l'ONU sur la fin du sida (2), le syndicaliste regrette d'ailleurs que la ministre de la Santé ait décliné l'invitation dans l'Isère. Parce qu'il craint « la disparition programmée de sa spécialité », le généraliste à Étoile-sur-Rhône (Drôme) ne mâche pas ses mots.
Marisol Touraine a décliné l'invitation à votre Congrès...
Dr Claude Leicher : Nous avons toujours invité les ministres de la Santé à venir au Congrès de MG France. La plupart du temps, ils s'y rendent. Cette année, Marisol Touraine fait un choix politique en ne venant pas alors que son calendrier le lui permettait. La ministre de la Santé pense sûrement que son électorat est à l'hôpital et que les médecins libéraux ne seront pas les électeurs du parti qu'elle soutient. Ce n'est pas le problème de MG France. Nous disons aux médecins : "regardez, déterminez-vous, puis choisissez".
Comment jugez-vous ses cinq années de mandat ?
Dr Claude Leicher : Nous constatons que ce quinquennat n'a pas du tout tenu ses promesses. Notamment en matière d'accès aux soins et concernant les soins de proximité. Le Président et sa ministre de la Santé ont résumé ces questions aux Urgences. Ils n'ont vu qu'une toute petite partie du problème et ont en plus laissé chuter la démographie des généralistes. La déception est très importante. D'autant plus que les investissements massifs du gouvernement sur l'hôpital public se sont succédés. François Hollande et Marisol Touraine n'ont pas eu d'ambition sur la médecine générale.
La ministre a tout de même décidé d'augmenter le C des généralistes à 25 euros mais sans donner de date ?
Dr Clauder Leicher : La consultation des généralistes à 25 euros est déjà en cours. Je facture à ce tarif depuis mars 2015. Et je vois que petit à petit le mouvement s'étend. Mais 25 euros, ce n'est pas une victoire à célébrer car c'est juste une mesure d'équité vis-à-vis des spécialistes.
Les promesses du directeur de l'Assurance maladie n'engagent que ceux qui les écoutent. Je dis donc aux généralistes "n'attendez pas la fin des négociations conventionnelles et prenez 25 euros dès maintenant". C'est une mesure de sauvegarde professionnelle, et la plupart du temps les patients sont remboursés des 2 euros de dépassement d'honoraires.
Êtes-vous toujours opposé au tiers payant généralisé ?
Dr Claude Leicher : Que les choses soient claires. MG France ne se rendra pas le 15 juin au ministère de la Santé pour faire la promotion du tiers payant généralisé. Bien au contraire. Nous y allons pour répéter que nous ne voulons toujours pas de cette obligation pour les médecins.
Si jamais les régimes d'Assurance maladie faisaient un système simple, nous dirions aux médecins de faire leur choix. C'est comme un portable, ça rend service mais il n'y pas une obligation d'acheter un smartphone. Ça n'a pas de sens. Nous ne sommes pas dans une guerre idéologique avez le gouvernement. Nous constatons juste que le dossier est mal ficelé et que le tiers payant généralisé actuel ne marchera pas.
(1) Conseil National de l'Ordre des Médecins
(2) La réunion de haut-niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies sur la fin du sida est organisée tous les cinq ans. Elle est une occasion pour les chefs d'Etat et de gouvernement d’inciter la communauté internationale à se mobiliser pour la fin du sida à l’horizon 2030, engagement pris lors du sommet mondial pour le développement durable de 2002