Médecins Sans Frontières est prête à s’amputer de 56 millions d’euros de financements. L’association humanitaire a annoncé ce 17 juin qu’elle n’accepterait plus les dons institutionnels de l’Union européenne et ses Etats membres. En coupant les ponts avec l’Europe, sa direction proteste contre la gestion de la crise migratoire.
100 000 personnes bloquées en Syrie
Le fonctionnement de MSF est principalement permis par des financements privés – qui représentent 92 % des apports. Mais en 2015, l’Union européenne a fourni à l’association 19 millions d’euros, ses Etats membres 37 millions. Une manne non négligeable dont l’association souhaite maintenant se passer.
En effet, MSF s’oppose clairement à des « politique de dissuasion dommageables et à l’intensification des tentatives de repousser les personnes et leurs souffrances loin des côtes européennes. » L’association livre des chiffres alarmants : sur les îles grecques, 8 000 personnes ne peuvent plus avancer. A la frontière entre la Turquie et la Syrie, la situation est encore plus inquiétante : 100 000 personnes sont « bloquées entre des frontières fermées et des lignes de front », dénonce Jérôme Oberreit, secrétaire général international de Médecins Sans Frontières.
Des accords qui fâchent
Un accord entre les pays de l’Union et la Turquie concentre la colère des dirigeants de MSF. Il apporte un milliard d’euros d’aide humanitaire à ce pays qui fait le pont entre l’Europe et le Moyen-Orient et abrite 3 millions de réfugiés syriens. Mais en échange, l’Etat doit lutter davantage contre la migration vers l’Europe. Ni plus ni moins de « l’instrumentalisation de l’aide humanitaire », aux yeux de MSF. « La seule offre de l’Europe envers les réfugiés consiste-t-elle à ce qu’ils restent dans les pays dont ils tentent de fuir désespérément ? », s’indigne Jérôme Oberreit.
La situation n’est pas près de s’améliorer puisque ce pacte pourrait être étendu à 16 autres pays d’Afrique et du Moyen-Orient, selon la Commission européenne. Cette fois, les aides au commerce et au développement pourraient être réduites en cas d’action jugée insuffisante. Parmi les pays visés figurent la Somalie, le Soudan et l’Afghanistan – qui représente l’origine principale des réfugiés après la Syrie.
Pays qui abritent des réfugiés (mi-2015). Source : rapport du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés