Sur le papier, l’idée est noble et même plutôt courageuse. On en parle depuis vingt ans sans jamais le faire : restructurer le tissu hospitalier français pour l’adapter aux besoins de la région et pour mieux structurer l’offre de soins.
Ce principe, inscrit dans la loi Santé, est entré en vigueur ce 1er juillet avec les groupements hospitaliers de territoire (GHT). Un « big bang », prévient Eric Favereau, dans Libération, puisqu’il s’agit de fondre les 1 100 hôpitaux du territoire en 200 GHT.
« Faire travailler les hôpitaux en réseaux, et surtout bien coordonner les activités des uns et des autres, entre les gros hôpitaux généraux et les petits hôpitaux locaux, c’est une nécessité », confirme au journaliste un ancien directeur des hôpitaux.
Derrière la réforme ambitieuse – rationaliser le parcours de soins des patients – se cache, bien sûr, la nécessité de trouver des gisements d’économies. L’heure n’est plus au développement mais au regroupement.
Comment expliquer en effet que de petites structures perdurent alors que l’activité est insuffisante pour satisfaire aux exigences de sécurité des soins ou encore que l’on multiplie les services de neurologie dans la ville alors que les structures de gériatrie font cruellement défaut ?
L’influence du député local pour maintenir l’activité chevrotante de sa maternité, le poids étouffant des décisions prises dans les cabinets ministériels expliquent cette fuite en avant.
Mais avec les GHT, terminée la gestion irrationnelle de l’hôpital. En tout cas, sur la papier. Pour en avoir le cœur net, le journaliste de Libération s’est promené dans cette France de la réalité, celle du terrain. « Le meilleur côtoie le bureaucratique », résume-t-il après son reportage.
Exemple à Valenciennes où plusieurs hôpitaux ont des difficultés de recrutement. « Cela fait deux ans que nous travaillons sur un projet médical », explique Philippe Jahan, directeur de l’hôpital de Valenciennes. Ce regroupement va permettre de renforcer les services des petits établissements de santé du territoire qui ont du mal à recruter », ajoute-t-il.
Autre son de cloche dans le Cantal. Là-bas, les petits hôpitaux travaillaient déjà en réseau avec le CHU Clermont-Ferrand. La mise en place du GHT a brutalement changé la donne. « C’est absurde, pointe Stéphane, du Ciss (1). Pour les patients, ce n’est pas sans conséquence : le temps de transport pour aller vers le CHU ne sera plus d’une heure [Clermont-Ferrand], mais de deux heures [Saint-Etienne] ! ».
Pour ce représentant des patients, cette décision sanitaire est incohérente, elle serait même le résultat de pressions politiques.
On est bien loin du but recherché par les GHT !
(1) Collectif interassociatif des usagers de la santé