Une assurance santé qui module sa prise en charge en fonction de votre comportement plus ou moins vertueux ? Si l’idée fait grimacer bien des Français, peu familiers avec ce type de modèle, elle commence à se développer en Europe.
Preuve en est avec le lancement sur le marché allemand, ce vendredi 1er juillet, d’une « assurance au comportement » par le groupe italien Generali. Baptisé « Vitality », le contrat prévoit des tarifs préférentiels aux clients qui prennent soin de leur santé, à travers des programmes personnalisés et un suivi sur mesure.
Courses bio, fitness...
De fait, il est fort aisé de mesurer les efforts déployés en faveur de sa propre santé. Les tickets de caisse des supermarchés bio, les visites médicales préventives ou encore les inscriptions aux salles de fitness, sont autant de preuves d’une bonne volonté sanitaire. « Vitality » propose ainsi des réductions sur les primes d’assurance allant de 11 à 16 % pour qui montre ces justificatifs.
Mais l’assureur va plus loin encore. Par le biais d’une application Android, les clients pourront transmettre des données de santé très précises sur le nombre de pas qu’ils exécutent chaque jour, ou sur leur pression artérielle.
Generali assure que les données de santé ne lui seront pas accessibles ; une société intermédiaire se chargerait de les recueillir puis de les traiter, avant de donner une note au client (bronze, argent ou or), transmise par la suite à l’assureur.
« La séparation entre l’assureur et les données est donc bien définie », promet Generali… ce dont on peut toutefois douter. La société intermédiaire s’appelle « Generali Vitality GmbH » et elle appartient au groupe. Difficile, dans ces conditions, de garantir une totale indépendance.
"Ce n’est pas démocratique"
Au-delà de la sécurité qui entoure les données de santé, c’est le principe même de cette assurance au comportement qui inquiète. Dans la tribune de Genève, les associations de consommateurs allemandes s’interrogent : « La question essentielle est de savoir si nous acceptons de privatiser nos politiques de santé. Est-ce aux assureurs de nous dicter notre comportement, de dire ce qu’il faut manger, faire ou fumer ? Ce n’est pas démocratique ». Des voix s’élèvent contre un système de bonus qui impliquerait immanquablement un système de malus…
Dans le monde de l’assurance, le débat fait d’ailleurs rage. Si la plupart des complémentaires santé ne veulent pas, officiellement, entendre parler de cette prise en charge modulable, dans les faits, toutes ont entamé une réflexion à ce sujet. D’ailleurs, « Vitality » sera déployé en septembre, « mais le système sera complètement différent », assure le service de communication de Generali France.
Freins français
De fait, ni le cadre réglementaire de l‘Hexagone, ni la philosophie qui sous-tend la prise en charge des soins, ne permettent de mettre en place une telle assurance sur le territoire. « Il s’agira en fait d’un programme de bien-être, sorte de coaching proposé aux salariés des entreprises dans le cadre de la complémentaire, mais bien distinct du contrat d’assurance », précise-t-on encore chez Generali. De fait, en France, les assureurs ne s’adressent pas aux individus mais aux sociétés.
L’assurance au comportement pourrait-elle, malgré tous ces freins administratifs, réglementaires et psychologiques, voir le jour dans le pays ? « La question ne se pose pas, puisque le modèle à la française est fondé sur le mutualisme », souligne la communication de Generali. Avec ce modèle, les personnes en bonne santé cotisent pour les patients atteints de maladie, à l’image des retraites financées par les actifs. Mais pour combien de temps ?