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Mille enfants suivis jusqu’à l’âge adulte

Allergies : sucer son pouce renforce les défenses immunitaires

Par Mathilde Ledieu

Chez les enfants qui sucent leur pouce ou rongent leurs ongles, on observe moins d’allergies dans l’enfance et à l’âge adulte. Un effet du système immunitaire.

markez/epictura

« Arrête de sucer ton pouce », « Ne te ronge pas les ongles ». Qui n’a jamais entendu ces reproches dans son enfance ? Les jeunes d’aujourd’hui auront maintenant des arguments pour continuer en toute tranquillité. Une étude parue dans la revue Pediatrics montre que ces pratiques protègeraient les enfants des allergies.
Les chercheurs de l’université MacMaster en Nouvelle-Zélande ont suivi 1 000 enfants jusqu’à l’âge adulte. Ils ont noté ceux qui suçaient leur pouce, rongeaient leurs ongles ou les deux, à l’âge de 5, 7, 9, et 11 ans. Ils les ont ensuite reconvoqués à 13 ans puis à 32 ans et ont effectué des tests de peau pour détecter d’éventuelles allergies. Les allergènes sont déposés sur le bras pour voir s’ils provoquent une réaction (rougeur, gonflement).

 

Se ronger les ongles

L’idée de départ était qu’une exposition précoce à des organismes microbiens réduirait le risque de développer des allergies. Le système immunitaire, au contact d’agents infectieux et de germes, apprend à les reconnaître et se renforce. Dans le cas d’un enfant qui suce son pouce ou ronge ses ongles, cela passe par la bouche.
L’hypothèse des scientifiques s’est vérifiée avec moins de sensibilisation atopique, c’est-à-dire moins de réactions allergiques au contact des allergènes. Nombre d’entre eux ont été testés : poussière, herbe, champignons dans l’air, chevaux, chiens, chats, acariens. Résultat : à treize ans, 45 % des enfants présentent en règle générale des réactions atopiques. Chez ceux qui sucent leur pouce ou rongent leurs ongles, ils ne sont plus que 40 %. Ce chiffre tombe même à 31 % pour ceux qui s’adonnent aux deux pratiques.

La tendance se confirme à l’âge adulte. En revanche, aucune conclusion n’a pu être établie concernant le développement de l’asthme et du rhume des foins, qui était aussi testé.
Pour arriver à ces données, les auteurs de l’étude ont pris en compte des critères pouvant influer sur la présence d’allergies : tabagisme chez les parents, allaitement, propriété d’animaux, surpeuplement du logement, statut socio-économique.

 

De mauvaises habitudes

Si ces résultats suggèrent que ces pratiques sont bénéfiques pour le développement immunitaire des jeunes enfants, il ne faut pas oublier qu’elles ont des effets délétères. Sucer son pouce est un réflexe physiologique chez les enfants, dès la grossesse. En revanche, si la succion se poursuit au-delà de six ans, des conséquences apparaissent sur la dentition. La langue se positionne mal et appuie sur les incisives au lieu d’épouser le palais. Dans de nombreux cas, la pratique prolongée nécessite des soins d’orthodontie pour redresser la mâchoire. Des bagues peuvent néanmoins être posées en prévention pour aider l’enfant à arrêter si les autres méthodes ont échoué.

Se ronger les ongles pouvait être utile chez les premiers hommes pour les entretenir. Avec les ustensiles d’aujourd’hui, cela n’a plus lieu d’être. Cette habitude peut être réflexe ou révéler un fort niveau d’anxiété ou de stress, mais surtout, elle peut provoquer des infections souvent douloureuses. Reste à trouver le juste milieu pour bénéficier des avantages sans les inconvénients.