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Procès aux assises

Maltraitance : Serena victime d'un syndrome autistique

Par Julie Levallois

Victime d'isolement depuis sa naissance, la fillette retrouvée dans un coffre en 2013 souffre aujourd'hui d'autisme. Ses parents encourent 20 ans de prison.

Dubova/epictura

L’affaire est sordide, ses retombées ne le sont pas moins. Serena, retrouvée nue, sale et déshydratée dans un coffre de voiture alors qu’elle n’avait que deux ans, souffre aujourd’hui d’autisme. Le procureur de la République de Brive (Corrèze), Laurent Czernik, l’a confirmé ce 12 juillet par voie de communiqué. Une expertise associe le trouble du développement aux conditions où la fillette a été élevée.

Absence de communication

L’affaire éclate au grand jour en octobre 2013. Une voiture est déposée chez un garagiste de Tarasson (Dordogne). Dans son coffre, une enfant de deux ans en état de déshydratation et souffrant manifestement d’une carence de soins. L’enquête révèle une histoire encore plus sombre. Depuis sa naissance, Serena a été maintenue cachée du reste du monde. Son seul lieu de vie est une pièce où personne ne se rend jamais. La petite fille est restée « enfermée dans l’obscurité et sans contact avec les personnes environnantes », résume Laurent Czernik dans un communiqué.

Plusieurs expertises ont été pratiquées sur cette jeune victime de maltraitance. La dernière en date confirme un syndrome autistique « vraisemblablement irréversible ». Alors que l’enfant est âgée de 4 ans au moment de l’examen, son développement réel évoque celui d’un bambin de 3 ans « sur le plan postural » et de 18 mois concernant la coordination.

Serena ne communique pas, son langage est composé de sons inarticulés « qui n’étaient pas adressés à autrui, sauf à des moments privilégiés, à son assistante maternelle. » Elle ne regarde pas les personnes qui l’entourent et ne tente pas d’entrer en communication avec elles. Autant de symptômes évocateurs d’un autisme.

Jusqu’à 20 ans de prison

La conclusion des experts risque de coûter cher aux parents de la fillette. En plus de confirmer le syndrome autistique, ils établissent un lien causal avec l’isolement et la privation sensorielle dont a été victime Serena.

Si un choc n’est en rien susceptible de provoquer un autisme, la restriction des sens est en revanche une piste de recherche sérieuse. Une étude de thèse menée sur le chien montre que les gestes et tics évocateurs de la pathologie « sont souvent observés chez des individus présentant un retard mental ou ayant subi une restriction environnementale précoce ».

Dans l’ouvrage Eloge de la pensée autistique, le psycho-pathologiste Benoît Virole, confirme cette thèse : des formes d’autisme existent chez des patients ne possédant pas les gènes impliqués. « Elles seraient des formes adaptatives à des situations événementielles particulières (par exemple hospitalisme, dépression maternelle, privation sensorielle, perte des aptitudes régulatrices) », écrit-il.

Ce lien causal pourrait bien requalifier les poursuites dont font l’objet les parents de Serena : Laurent Czernik parle à présent de « violences habituelles sur mineure de moins de 15 ans ayant entraîné une infirmité permanente ».
Les faits sont donc passibles d’une réclusion criminelle devant une cour d’assises. Le procureur de la République de Brive a demandé à être dessaisi de l’affaire au profit du pôle d’instruction criminelle du TGI de Limoges. Les deux adultes encourent jusqu’à 20 ans de réclusion.