Les sondages sont sans appel : les Français estiment que les soins dentaires coûtent trop cher. Les inégalités que le reste à charge engendre se ressentent sur la santé bucco-dentaire des Français, dès le plus jeune âge : à 6 ans, 10 % des enfants de cadres présentent des caries, contre trois fois plus pour les enfants d’ouvriers.
Lancée dans un plan de réforme de l’Assurance maladie, la ministre de la Santé aurait demandé à son directeur général, Nicolas Revel, d’entamer des discussions avec les dentistes dès septembre pour établir une nouvelle convention dès la rentrée scolaire, afin de lisser ces inégalités d’accès aux soins.
Dans une lettre que lui aurait adressée Marisol Touraine, Nicolas Revel se serait vu confier comme objectif principal de « réduire le reste à charge des ménages sur les soins dentaires en limitant les dépassements d'honoraires dès 2017 », rapporte Les Echos. La ministre espère ainsi faire baisser le nombre de patients renonçant à des soins qu’ils estiment trop onéreux.
38 % des Français refusent les soins
Le montant des soins bucco-dentaires annuel est estimé à environ 10 milliards d’euros, dont plus de 2 milliards sortiraient directement de la poche des patients, une fois les remboursements de l’Assurance maladie et des mutuelles déduits. Un reste à charge qui engendre des inégalités d’accès aux soins : les Français seraient en effet 38 % à n’avoir pas avoir réalisé les soins recommandés un an après l’émission du devis par leur dentiste, d’après un sondage Santéclair de 2015.
Les soins orthodontiques et la pose de prothèses sont particulièrement visés. En 2013, le Collectif Interassociatif Sur la Santé (CISS) révélait ainsi que sans complémentaire santé, le reste à charge par prothèse dépasse 200 euros en moyenne et peut grimper jusqu’à plus de 400 euros à Paris. « Accéder à ces soins dentaires devient un luxe pour un nombre toujours plus important de nos concitoyens, avait-il alors dénoncé. Aujourd’hui, même pour une couronne céramique sur métal non précieux, la plus fréquente, c’est l’usager qui paie la plus grosse part (74 %). » Marisol Touraine recommande donc au patron de l’Assurance maladie d’accéder aux demandes des dentistes, en revalorisant les soins de base et leur remboursement. En contrepartie, les dépassements d’honoraire pourraient être plafonnés.
Lutte contre les déserts médicaux
La ministre souhaite également que la copie de la prévention soit revue et corrigée. D’après l’Union française pour la santé bucco-dentaire (UFSBD), seulement 36 % des Français seraient conscients de l’impact que peuvent avoir les problèmes dentaires sur la santé générale. « Le bucco-dentaire reste l’un des domaines de la santé où la prévention représente une vraie chance de pouvoir agir sur une pathologie totalement évitable, parce qu’avant tout la résultante d’un comportement non ou mal acquis », souligne le Dr Sophie Dartevelle, la présidente de l’UFSBD.
Enfin, l’Assurance maladie devra se pencher sur la question des déserts médicaux. Afin de favoriser l’installation de dentistes dans des zones qui en sont dépourvus, Marisol Touraine penche pour le bâton, puisque la carotte et les subventions accordées pour ceux qui souhaitent s’y installer ne semblent pas suffire. Afin de décourager les dentistes qui veulent s’établir dans des endroits déjà occupés, elle souhaite que soit établi « un dispositif de régulation du conventionnement ». Un point qui trouvera sans doute plus difficilement l’appui des syndicats de dentistes.