Un essai clinique sur un « médicament » controversé a été lancé ce lundi au Brésil par l’Institut de cancérologie de Sao Paulo. Dix patients atteints d’un cancer ne suivant aucune thérapie vont recevoir ce traitement surnommé « la pilule du cancer » pour évaluer son efficacité. Si aucun effet secondaire grave n’est observé, un millier de patients supplémentaires seront enrôlés dans cette étude.
« La pilule du cancer » contient de la phosphoéthanolamine synthétique, une molécule développée dans les années 1990 par le chimiste Gilberto Chierice de l’université de Sao Paulo. Des travaux réalisés sur des cellules cultivées en laboratoire et chez la souris ont montré que cette substance pouvait tuer les cellules cancéreuses en agissant sur le système immunitaire. Des chercheurs brésiliens de l’université de Sao Paulo ont notamment montré que cette molécule peut bloquer la progression de la leucémie chez des souris. Reste que la littérature scientifique ne conclut pas à un effet prometteur. Les effets secondaires et risques pour l’homme sont par ailleurs inconnus.
Une molécule au coeur d'une bataille juridique
Et pourtant, depuis 20 ans des chimistes de l’université de Sao Paulo encapsulent la molécule et la distribuent à des malades. Un petit groupe de survivants du cancer parlent même de rétablissements extraordinaires, perpétuant ainsi la réputation de remède miracle.
En juin 2014, l’université a tenté de mettre fin à ce commerce illégal. Mais plus de 15 000 patients ont porté plainte contre l’université de Sao Paulo pour continuer à recevoir leur traitement. Une bataille juridique à laquelle s’est ajoutée un jeu de lobby sur les politiques et autorités sanitaires pour faire autoriser ce traitement expérimental jamais testé chez l’homme.
Une pression qui a fini par payer. Bien que des tribunaux aient suivi l’avis de cancérologues et aient interdit l’utilisation de cette pilule, la présidente brésilienne à craquer face à la pression populaire. Acculée et affaiblie politiquement, Dilma Roussef a promulgué en avril dernier une loi permettant la fabrication, la prescription et la distribution de cette molécule. Une décision politique qui a occulté complètement la science, ont déploré de nombreux spécialistes et scientifiques opposés à la commercialisation de la « pilule du cancer ».