Les résultats ne sont pas probants mais ils restent intéressants. Pour la première fois depuis une décennie, un essai clinique a évalué un médicament contre la maladie d’Alzheimer. La molécule testée cible un nouveau marqueur de la maladie : la protéine tau, qui s’accumule dans les cellules nerveuses, provoquant leur dégénérescence. Les résultats de l’essai de phase III ont été présentés à la conférence internationale de l’Alzheimer’s Association, qui se tenait à Toronto (Canada) du 22 au 27 juillet.
Inhibe la protéine tau
La molécule testée par l’équipe de l’université McGill (Montréal, Canada) se nomme LMTM, pour leuco-methylthioninium-bis. Elle agit en tant qu’inhibiteur sélectif de l’agrégation des protéines tau, mécanisme confirmé in vitro et chez des souris génétiquement modifiées pour développer des symptômes évocateurs de la maladie d’Alzheimer.
Un premier essai clinique de phase II a expérimenté en 2008 le médicament en monothérapie chez des patients atteints de formes légères à modérées. Cette étude, menée sur 891 malades au même stade, a expérimenté une molécule plus stable qui peut être administrée à de plus fortes doses. Trois groupes ont été formés : un a reçu un placebo, afin de contrôler les effets du traitement, les deux autres ont pris un comprimé à 150 mg ou à 250 mg chaque jour.
Après 15 mois d’expérimentation, aucune différence n’a émergé entre le bras médicament et le bras placebo de l’étude. 80 % des volontaires ont en revanche ressenti des effets secondaires : des troubles gastro-intestinaux, du système nerveux, des infections mais aussi des problèmes rénaux ou urinaires. « Les analyses complémentaires sont très encourageantes, et montrent que les patients prenant le LMTM en monothérapie ont un déclin significativement plus lent que les patients contrôle ou ceux qui prennent le LMTM en complément des traitements existants », objecte toutefois Serge Gauthier, coordinateur de l’étude.
Attaquer de plusieurs angles
Dans un sous-groupe prédéfini, le médicament a tout de même livré des résultats : la petite population qui n’avait jamais pris de traitement contre Alzheimer, les fonctions cognitives et physiques se sont améliorées. L’atrophie du cerveau a aussi reculé. « Les résultats de cet essai de phase III sont intéressants mais aussi complexes, et il faudra du temps pour que le secteur détermine leur signification », résume Serge Gauthier.
Pour la directrice scientifique de l’Alzheimer’s Association, le simple fait de parvenir au terme de cet essai clinique est un symbole fort. « Le scénario le plus probable pour parvenir à un traitement efficace est d’attaquer la maladie depuis plusieurs angles », estime Maria Carrillo. C’est aussi la première molécule qui cible les causes de la maladie, et non ses symptômes. L’étude constitue donc une avancée majeure à l’heure où un cas de démence se déclare toutes les 3 secondes. Les deux tiers sont une maladie d’Alzheimer.