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Journée internationale des gauchers

Cerveau des gauchers : la science leur rend justice

Par Marion Guérin

Beaucoup d’idées fausses ont véhiculé pendant des siècles au sujet des gauchers. L’imagerie cérébrale a permis de rétablir certaines vérités.

noblige/epictura

Les gauchers n’ont pas toujours eu la vie facile. On les considérait autrefois comme des créatures démoniaques ou bien des anomalies de la nature - l’humain est après tout le seul animal gaucher. A travers les siècles, ce statut a évolué ; ils ont été associés à des doux rêveurs, légèrement benêts.

D’où les coups de règles sur la main et autres méthodes scolaires contrariantes. C’est que pendant longtemps, les scientifiques ont associé le fait d’être gaucher à une prédominance de l’hémisphère droit du cerveau, qui contrôle la main gauche. Et, du coup, à un moindre expression de l’hémisphère gauche, responsable de la parole, du raisonnement, de la logique, bref, l’hémisphère du rationnel et de l’intelligence dans sa forme la plus cartésienne. L’hémisphère des droitiers, donc.

Les gauchers savent parler

Et puis il y a eu Freud, Chaplin, Obama, Michel-Ange, des gauchers quand même très doués pour des gauchers. Surtout, l’imagerie cérébrale est arrivée et a permis d’observer d’un peu plus près ce qu’il se passe dans la tête de cette population.

Le premier constat est sans appel : les gauchers n’ont pas un cerveau à l’envers. Des travaux menés en 2015 par le Groupe d’imagerie neurofonctionnelle de Bordeaux (GIN) montrent que si dans les taches linguistiques, 94 % des droitiers manifestent une spécialisation hémisphérique gauche, les gauchers sont presque autant à faire de même.

Ces résultats montrent par ailleurs que la préférence manuelle est indépendante de l’utilisation des hémisphères. « Le fait que l’hémisphère gauche contrôle à la fois le langage et la main droite chez une grande majorité des êtres humains n’est pas le signe que ces phénomènes soient liés », expliquent les auteurs.

Ainsi, dans la parole et le raisonnement, gauchers et droitiers semblent utiliser l’hémisphère gauche de la même manière. En revanche, l’étude a trouvé un lien entre une forte préférence manuelle gauche et une latéralisation droite pour le langage « dans un groupe rare d’individus parfaitement normaux (0,06 % de la population générale) », ce qui suggère que la parole n’est pas l’apanage de l’hémisphère gauche… Tout un mythe qui s’écroule !

Plus forts en sport ?

Les gauchers n’ont d’ailleurs pas fini de prendre leur revanche. Plusieurs études ont mis en avant le fait que les gauchers auraient tendance à être meilleurs que les droitiers dans certains sports, notamment dans les sports de duels demandant des temps d'analyse et de réaction très courts (escrime, boxe, tennis de table…).

Là aussi, l’imagerie cérébrale a permis d’y voir plus clair et de confirmer cette intuition. L’équipe du GIN a pu mettre en évidence que les circuits dédiés à l’attention spatiale et aux saccades oculaires s’activent généralement dans l’hémisphère droit. Or, elle a constaté que cette latéralisation à droite était plus marquée chez les gauchers, et en particulier chez ceux qui ont un œil dominant droit. Ce qui explique les meilleures performances, et, « sur le plan évolutif, la persistance de 10 % de gauchers dans la population générale ». Un groupe dont le cerveau n’a pas fini de dévoiler ses secrets !