Pour parvenir à ses objectifs, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme a besoin que les Etats intensifient leur participation. Mission accomplie lors de la cinquième conférence triennale de reconstitution des ressources du Fonds mondial pour la période 2017-2019 qui s’est ouverte ce vendredi à Montréal (Canada). Ce rendez-vous était très attendu, puisqu’il sert à déterminer comment la lutte mondiale contre ces maladies va s’organiser pour les années à venir au niveau de sa stratégie, mais surtout de ses moyens.
Et c'est justement sur ce dernier point que les objectifs ont été atteints. Le Fonds mondial a réussi samedi à collecter les près de 13 milliards de dollars nécessaires pour financer les traitements afin d'éradiquer ces trois épidémies d'ici 2030 dans le monde. « Nous avons levé près de 13 milliards de dollars et grâce à cela nous avons sauvé 8 millions de vies », a déclaré à l'Agence France Presse (AFP) le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, qui a clôturé la manifestation.
« La conférence a permis de recueillir une remarquable somme de plus de 12,9 milliards de dollars US sous forme de contributions annoncées », a précisé le Premier ministre. « Nous allons débarrasser le monde du sida, de la tuberculose et du paludisme (...) nous allons en finir pour de bon avec ces épidémies grâce aux financements des gouvernements, mais aussi des partenaires privés et la société civile », a-t-il conclu.
Bill Gates met la main à la poche
En arrivant pratiquement à la barre des 13 milliards fixée par le Fonds avant la conférence, « nous aurons les ressources pour remplir nos objectifs » sur les trois prochaines années, a indiqué pour sa part le milliardaire et philanthrope Bill Gates. Il a, par ailleurs, annoncé une allocation de 600 millions de dollars d'ici 2019, venant s'ajouter à 1,6 milliard de dollars déjà versés par sa fondation au Fonds mondial depuis sa création en 2002.
De son côté, le chanteur Bono, leader du groupe U2 et cofondateur l'ONG ONE qui oeuvre pour réduire la pauvreté et les épidémies en Afrique, a parlé d'« une bonne journée avec la réalisation de l'objectif. En ces temps de contraintes budgétaires et d'une montée de l'isolationnisme dans certains pays, les dirigeants du monde se sont engagés à faire le plus important investissement de l'histoire dans un projet de santé mondiale », s'est-il félicité.
La parole la plus prudente et la plus mesurée est à mettre au bénéfice du Sud-coréen Ban Ki-Moon, le secrétaire général des Nations unies : « Nous célébrons 15 ans de réussite mais nous sommes à la recherche de plus de succès encore dans les prochaines années », a-t-il indiqué, rappelant qu'avec le travail du Fonds mondial, plus de 20 millions de vies avaient été sauvées. Et pour conclure, le directeur général du Fonds mondial Mark Dybul se veut optimisite : « Nous sommes maintenant au point d'inflexion de la lutte contre ces épidémies. Nous pouvons être la génération qui va garder sous contrôle ces épidémies ».
La France n'augmente pas sa contribution
Côté États, il faut souligner que sur les 12,9 milliards de dollars promis, les États-Unis vont abonder au Fonds mondial à hauteur de 4,3 milliards de dollars, devant le Royaume-Uni avec 1,1 milliard de livres (1,28 milliard d'euros). Cette dernière passe ainsi devant la France (1,08 milliard d'euros) qui a choisi de ne pas pas augmenter sa contribution. Au contraire de l’Allemagne, l’Italie et le Canada qui ont annoncé de fortes augmentations (entre 20 % et 35 %). Le contraste avec le relâchement du gouvernement français a bien évidemment fait réagir les associations.
« Nous sommes choqués de ce statu quo, a réagi dans un communiqué Hakima Himmich, présidente de Coalition PLUS. Jusqu’en 2012, la France donnait l’exemple aux autres, mais sous la Présidence de François Hollande elle refuse de participer à l’accélération de la riposte mondiale contre le sida. Il avait pourtant affirmé que la France voulait la fin de la pandémie et s’en donnerait tous les moyens. »
Même son de cloche chez Aurélien Beaucamp, président de l’association AIDES : « Tous les autres dirigeants ont participé à l’effort accru de financements contre le sida : Barack Obama, Angela Merkel, Theresa May, Matteo Renzi, Justin Trudeau, Jean-Claude Juncker, et j’en passe. Qui manque à l’appel ? François Hollande. En refusant d’augmenter la contribution de la France, le président abandonne à la mort des milliers de malades du sida sans traitement », a-t-il lâché.
Des financements internationaux nettement insuffisants
Au total, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme a donc obtenu des Etats donateurs près de 13 milliards de dollars. Soit à peine un milliard de plus qu’à la dernière conférence de Reconstitution en 2013. Or, d’après l’Organisation des Nations Unies (ONU), c’est de 6,5 milliards de dollars annuels qu’il faut augmenter les financements pour atteindre les objectifs sanitaires que la communauté internationale s’est fixés en juin dernier.
Inquiet de cette contradiction entre les ambitions affichées et les moyens débloqués, le Secrétaire Général des Nations Unies avait lancé le 1er avril dernier un appel aux chefs d’Etat, les mettant en garde contre la reprise de la pandémie s’ils n’accélèrent pas la riposte : « Nous ne pouvons pas mettre fin à l’épidémie du sida sans augmenter les financements. […] Malgré les progrès remarquables qui ont été réalisés, si nous acceptons le statu quo et en restons là, l’épidémie reprendra de plus belle dans plusieurs pays à revenus faibles et intermédiaires », annonçait-il...