Ce mardi, à l’Académie de médecine (Paris), c’était un peu le Pr Perronne contre le reste du monde. Les principaux experts de la maladie de Lyme ont alimenté la controverse en campant sur leurs positions respectives. Plusieurs points cruciaux font débat dans la communauté scientifique et divisent les chercheurs français. En particulier, la fiabilité des tests diagnostiques, l’existence d’une forme chronique de la maladie, et la nécessité de la traiter par des antibiotiques sur des durées prolongées.
Contractée à la suite d’une morsure de tique infectée, Lyme se manifeste parfois par un érythème migrant, une sorte de tache circulaire rouge qui se crée autour de la piqûre et qui s’étend progressivement. Lorsqu'elle est repérée tôt, la maladie se soigne bien dans la plupart des cas, par un traitement antibiotique administré durant 2 à 3 semaines. Là-dessus, tous semblent d’accord. C’est sur la suite des événements que le bât blesse, dans les cas – fréquents – sans érythème, ou lorsque celui-ci est masqué. La maladie peut alors évoluer et devient beaucoup plus difficile à soigner, les symptômes étant peu spécifiques et les tests biologiques rendant beaucoup de faux négatifs.
Deux écoles qui semblent inconciliables
D’un côté, les spécialistes des Hôpitaux universitaires de Strasbourg – les Prs Christmann et Jaulhac – soutenus dans leur thèse par le Dr François Bricaire, de la Pitié-Salpêtrière, rejettent l’idée d’une forme chronique, y préférant un « syndrome post-Lyme ». « Un patient qui a été traité correctement par antibiotiques n’évolue pas vers la chronicité, estime le Pr Christmann. Il y a des formes tardives : ce sont des malades qui n’ont pas été diagnostiqués ».
Le Pr Perronne, de l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches, fortement soutenu par les associations de malades, martèle à l’inverse que des formes chroniques peuvent apparaître et qu’il faut faire évoluer les recommandations de traitement pour permettre aux médecins de prescrire des antibiotiques sur plusieurs mois. « La persistance bactérienne après antibiothérapie existe, elle a été prouvée scientifiquement, s’est-il agacé lors de la conférence. Les Borrelia changent de forme, et peuvent se réactiver ».
Les associations de patients dans l’attente
En attendant qu'un consensus émerge, de nombreux patients subissent une errance diagnostique puis, guidés par leurs symptômes peu spécifiques, sont renvoyés entre les services de neurologie et de rhumatologie, finissant parfois en consultation psychiatrique.
Interpellée par les associations de patients en mai dernier, la ministre de la Santé avait promis un plan sur la maladie de Lyme. Il devrait être rendu public le 29 septembre prochain, après une réunion - qui s'annonce animée - où seront présents médecins, chercheurs, et associations de patients. « Je préfère rester optimiste sur les annonces qui seront faites au ministère de la Santé le 29 septembre, a expliqué à Pourquoidocteur Pierre Hecker, vice-président de l’association France Lyme. Les sujets qui seront abordés sont prometteurs. »