Il n’existe pas qu’une seule forme de VIH. Ce virus qui s’attaque aux cellules immunitaires possède en fait deux souches. Le VIH-2, plus présent en Afrique de l’Ouest, est bien moins agressif que le VIH-1, à l’origine de la pandémie. Le système immunitaire le reconnaît mieux et le combat donc plus efficacement. C’est ce que montre une équipe de l’Inserm qui s’est associée à l’Agence national de recherche sur le sida (ANRS). Des « super lymphocytes » sont à l’œuvre, expliquent-ils dans le Journal of Immunology.
Ces cellules chargées de réguler la réponse immunitaire ont été prélevées chez des patients infectés par le VIH-2. La souche est peu fréquente en France. 1,5 % de la population séropositive en est porteuse. Mais elle présente une autre particularité : chez 8 patients sur 10, l’infection est contrôlée sans recours au traitement. Dans le VIH-1, ce phénomène est quasi-inexistant et le traitement antirétroviral est indispensable pour assurer la survie. Sans cela, les ressources immunitaires s’épuisent, provoquant un syndrome d’immunodéficience avérée (Sida). De fait, le virus s’attaque aux lymphocytes T CD4 qui régulent la réponse face aux infections.
Une ressource inépuisable
Pour comprendre ce décalage, les auteurs de l’étude ont comparé d’autres cellules immunitaires : les lymphocytes CD8. Ils organisent la réponse ciblée grâce à une mémoire des infections précédentes. Dans le cas du VIH-1, ces ressources s’épuisent rapidement.
Mais pour le VIH-2, le mécanisme est totalement différent. Non seulement le stock de départ est plus élevé, mais il est en outre plus efficace. Et pour cause, ces lymphocytes reconnaissent une protéine (gag) exprimée à la surface des cellules hôtes, infectées par le VIH. Comme leur formation débute dans la moelle osseuse, la réserve est virtuellement inépuisable.
« Il existe incontestablement un cercle vertueux permettant un bon contrôle du virus », résument Victor Appay et Asier Saez-Cirion, principaux auteurs des travaux.
La découverte a de quoi enthousiasmer, mais de nombreuses inconnues persistent sur le mécanisme qui différencie autant la réaction face aux deux souches. L’équipe va approfondir les recherches pour mieux appréhender les caractéristiques typiques de ces « super lymphocytes ».
L’objectif sera aussi d’identifier les récepteurs qui entrent en jeu, à la fois sur le virus et les cellules immunitaires.
A terme, les chercheurs n’excluent pas de traduire ces résultats au VIH-1. Une cible à long terme qui relève presque de la quête du Graal.