Six ans plus tard, le calvaire recommence. L’ouragan Matthew a ravagé l’île d’Haïti le 5 octobre dernier, faisant au moins 372 morts. Un bilan provisoire qui risque de s’alourdir. Après les vents violents, c’est le manque d’eau potable qui menace la population. Le pays pourrait ainsi faire face à une résurgence du choléra. A Port-Salut, au Sud-ouest, une personne est déjà décédée de la maladie. Neuf autres sont hospitalisées dans l’unique hôpital de la ville.
Manque d’eau
La précarité règne au lendemain de l’ouragan le plus violent depuis une décennie. Plus de 175 000 Haïtiens sont hébergés dans des abris provisoires. A l’extrême sud de l’île, où les dégâts sont les plus graves, les secours peinent à progresser. « Nos équipes sur le terrain se sont rendues à Jérémie et Les Cayes par voie aérienne, et elles nous disent que la dévastation est totale », souligne le Dr Jean-Luc Poncelet, représentant du bureau de l’OMS en Amérique latine. L’eau potable, notamment, commence à cruellement manquer.
Dans ces conditions sanitaires, il n’est pas surprenant de voir des cas de choléra ressurgir. En effet, le vibrion se transmet par des eaux contaminées. La situation risque de se dégrader encore, aux yeux de l’Organisation panaméricaine de la santé (PAHO). « Des efforts étaient déjà accomplis pour contrôler l’épidémie actuelle de choléra », précise le Dr Ciro Ugarte, directeur du programme des urgences sanitaires. Mais les vents de 230 km/h qui ont déferlé sur l’île ont remis en cause ces travaux déjà peu efficaces.
Le déni de l’ONU
Le choléra a été introduit en Haïti en janvier 2010. L’île subit alors un séisme massif, d’une échelle de 7 sur l’échelle de Richter. 10 000 personnes décèdent lors des secousses. Une tragédie à laquelle vient se rajouter une seconde catastrophe. Plusieurs cas de choléra émergent en octobre, alors que le vibrion n’était plus présent depuis un siècle. Rapidement, une épidémie se développe. Des Casques bleus népalais en sont à l’origine. Envoyés dans le cadre de la Minustah, ils contaminent un affluent de l’Artibonite avec des eaux usées et des matières fécales.
Le scandale a été longuement nié par l’ONU. Elle a finalement reconnu son rôle dans cette flambée en juillet dernier. Durant le pic de l’épidémie, le choléra infecte 800 000 Haïtiens. Les programmes développés depuis sont peu efficaces : 500 cas sont dénombrés chaque semaine. Avec l’ouragan Matthew, le spectre de cette épidémie ressurgit. La France en a bien conscience. Elle a envoyé, entre autres, deux stations de potabilisation de l’eau et des kits médicaux contre le choléra.