ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > GPA : qui sont ces Indiennes qui louent leur utérus

GPA : qui sont ces Indiennes qui louent leur utérus

Par Stéphany Gardier

Si l’Inde attire de nombreux touristes chaque année, elle accueille aussi de nombreux couples confrontés à l’infertilité et décidés à avoir recours à la gestation pour autrui (GPA). Cette pratique a été légalisée dans le pays en 2002, permettant ainsi aux Indiennes de mener une grossesse contre rémunération. L’Institut national français d’études démographiques (Ined) a cherché à brosser le portrait de ces femmes qui, pour quelques mois, acceptent de « louer » leur utérus.

 

L’étude, menée par trois chercheuses de l’Ined, auprès de médecins, de futurs parents, et de mères porteuses, aboutit à des conclusions loin des « idées reçues », commente Le Monde. A commencer par celle du statut social de ces femmes. L’image de la femme très pauvre qui accepte une GPA pour subsister serait erronée. Les données révèlent que ces femmes ne sont « ni parmi les moins lettrées ni parmi les plus pauvres » des Indiennes.

« Les gestatrices réunissent en général les critères fixés par les recommandations gouvernementales indiennes : être mère, être âgée de 21 à 35 ans, être mariée et avoir l’accord explicite de son mari, avoir eu moins de cinq naissances vivantes », peut-on lire dans l’étude publiée ce 12 octobre. La moitié de ces mères porteuses gagnent par ailleurs un salaire supérieur à celui des trois quarts de la population indienne.

Les chercheuses expliquent que les cliniques qui proposent aujourd’hui des GPA ne veulent pas recruter des femmes de la rue, pour des question d’hygiène, d’état de santé et, bien sûr, répondre aux critères des parents. Par ailleurs, difficile pour une femme pauvre d’avoir accès aux informations sur ce commerce, ou même d’oser franchir le seuil d’une de ces cliniques…

Ces femmes se disent également « aptes à comprendre une pratique médicale complexe », et elles ne sont pas dupes sur les conséquences sociales de leur acte. Bien que légale, la GPA reste mal perçue en Inde, rappelle Le Monde : « Elle y est associée à des relations sexuelles adultères, car les techniques de procréation médicalement assistée sont mal connues ». Les mères porteuses expliquent donc préférer s’exiler le temps de leur grossesse.

L’étude indique par ailleurs que le motif principal avancé par les « gestatrices » est l’argent. Rémunérées entre 2 800 et 7 000 euros, ces femmes peuvent en une grossesse gagner l’équivalent de plusieurs années de salaire. De quoi assurer l’avenir de leurs propres enfants, ou accéder à la propriété ou payer les dettes de la famille.

 

Les chercheuses, qui ont mené leurs travaux entre 2013 et 2014, ont souligné que leur enquête sur place avait été compliquée par une volonté de l’Etat de faire évoluer la loi sur la GPA. Quelque 25 000 bébés seraient nés après une GPA, dont la moitié ont des parents étrangers, soulignent les scientifiques. Un chiffre qui montre l’existence d’un réel « tourisme » de la GPA, contre lequel le gouvernement indien souhaite désormais lutter. En août 2016, un projet de loi visant à restreindre la GPA aux seuls couples indiens a été approuvé. Il prévoit également que les rémunérations ne seront plus possibles.