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Lévothyroxine

Hypothyroïdie : 15 % des patients traités souffrent encore

Par Audrey Vaugrente

Le traitement de l'hypothyroïdie n'estompe pas totalement les symptômes. Une étude montre que les patients sont plus à risque de surpoids et de dépression malgré la lévothyroxine.

alexraths/epictura

Quand la thyroïde fonctionne mal, le corps se délite. En France, l’hypothyroïdie touche 0,5 % de la population. Une maladie rare mais aux effets larges. Elle provoque en effet un ralentissement du fonctionnement de l’organisme, y compris du cœur et du cerveau. Sans traitement, elle finit par être mortel. Mais le médicament de référence, la lévothyroxine, n’est pas toujours efficace à 100 %. C’est ce que souligne une étude parue dans le Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism. Elle explique notamment pourquoi certains malades se plaignent toujours des symptômes, malgré des analyses sanguines positives. Aux Etats-Unis, 15 % se plaignent d’un tel paradoxe.

L’ombre d’un doute

La lévothyroxine est un médicament qui sert de relais à la thyroïde peu active. Il aide à produire une hormone spécifique qui stimule la glande et rétablit le fonctionnement métabolique. Les symptômes classiques de la maladie s’estompent alors. Et pourtant, certains patients continuent de ressentir fatigue, dépression, léthargie. C’est ce que constatent Antonio Bianco, chercheur à l’université Rush (Chicago, Etats-Unis), et son équipe spécialisée dans les pathologies de la thyroïde.
« Les médecins continuent de leur affirmer qu’ils donnent la bonne dose de médicament et que la TSH est normale », souligne Antonio Bianco, co-auteur de ces travaux. La TSH (thyroid-stimulating hormone) est une hormone censée témoigner de l’efficacité du traitement.

Mais ce critère pourrait être partiellement trompeur. L’équipe d’Antonio Bianco rencontre donc régulièrement des patients qui se plaignent de symptômes persistants. Elle a donc tiré deux groupes de dossiers du sondage national sur la santé et la nutrition (NHANES) : 469 volontaires sous lévothyroxine et autant de sujets sains. Leurs doutes se sont alors confirmés. Même avec des analyses sanguines normales, des différences émergent entre les patients et les participants en bonne santé.

La fin d’une ère ?

Les personnes qui souffrent d’hypothyroïdie prennent plus d’antidépresseurs que les autres. Or, la maladie affecte le fonctionnement du cerveau, favorisant les états d’âme. Ces patients ont aussi davantage recours à des bétabloquants, indiqués dans l’hypertension artérielle, et des statines, qui luttent contre l’excès de cholestérol. Deux pathologies qui accompagnent souvent un dysfonctionnement de la thyroïde. Les malades pèsent aussi 4,5 kg de plus en moyenne et se montrent moins actifs au quotidien.
Comme le souligne Antonio Bianco, « cette étude documente pour la première fois, de manière non biaisée, le fait que les patients sous lévothyroxine se sentent moins bien et sont moins actifs que les contrôles. »

En bref, la lévothyroxine ne semble pas rendre à son corps l’intégralité de ses possibilités. Des anomalies persistent et les patients devraient en être conscients. « Les médecins devraient expliquer aux patients qu’ils vont tenter de réguler leur TSH mais qu’ils seront à risque de prise de poids, de dépression et de fatigue », estime le spécialiste.
L’Association américaine de la thyroïde, pour sa part, plaide en faveur du lancement de nouveaux essais cliniques. Elle propose d’évaluer des thérapies combinées. Depuis les années 1970, elles ont été délaissées au profit de la lévothyroxine, dont les effets étaient plus marqués.