C’est une proposition qui risque de faire couler beaucoup d’encre parmi les spécialistes de la bioéthique. Les Pays-Bas, où l'euthanasie est légale depuis 15 ans, envisagent d'autoriser l'aide au suicide pour les personnes âgées qui ont le sentiment d'avoir « accompli » leur vie, et ce, même si elles ne sont pas malades.
« Les personnes qui pensent, après avoir mûrement réfléchi, avoir achevé leur vie, doivent, sous de strictes conditions et selon des critères très précis, être autorisées à finir leur vie d'une manière qui leur semble digne », ont assuré les ministres de la Santé et de la Justice dans une lettre adressée au Parlement, cités par l’AFP.
5516 euthanasies en 2015
Avec la Belgique, les Pays-Bas ont été en 2002 le premier pays au monde à légaliser l'euthanasie. Pour autoriser la procédure, au moins deux médecins doivent avoir la conviction qu'il n'existe pas d'autre solution raisonnable pour le patient et que la souffrance est « insupportable et sans perspective d'amélioration ». Certaines maladies mentales peuvent être considérées comme « souffrance insupportable ».
Les enfants de plus de 12 ans peuvent également demander l'euthanasie, ce qui génère d’intenses débats dans le pays et à l’international. En 2015, les Pays-Bas ont enregistré 5 516 cas d'euthanasie, soit 3,9 % des décès dans le pays, contre 3 136 cas cinq ans plus tôt. Parmi ces personnes, plus de 70 % souffraient de cancer et 2,9 % de maladies psychiatriques ou de démence.
« Assistant à la mort »
Le futur texte, qui sera élaboré après des discussions avec des experts, ne portera que sur les personnes âgées, mais le gouvernement n'a pas évoqué d'âge spécifique. Les personnes concernées « ne voient plus de possibilité pour donner un sens à leur vie, vivent mal leur perte d'indépendance, ont un sentiment de solitude », assure le gouvernement. « Mais pour pouvoir mettre en place leur fin de vie, elles ont besoin d'aide. »
Un « assistant à la mort », une personne avec une éducation médicale et des formations spécifiques, devra autoriser la procédure après avoir exclu qu'un traitement puisse effacer ce « souhait de mort ».
Inquiétudes
Pour Robert Schurink, président de l'Association néerlandaise pour une fin de vie volontaire, « ceci offre une solution », a-t-il affirmé au quotidien AD : certaines personnes « étaient contraintes à des mesures drastiques comme le suicide ou arrêter de manger et de boire quand elles ne voulaient plus vivre ».
Toutefois, plusieurs partis de l'opposition ont critiqué le projet. Le Parti socialiste, notamment, estime qu'un éventuel texte ne peut que mener à « une pression sur les autres personnes âgées qui vont se sentir de trop dans la communauté ». Certains Néerlandais éprouvent la même inquiétude évoquant « les personnes fragiles, solitaires, désespérées » alors que le hashtag #voltooidleven (#vieaccomplie) était en tête des tendances sur Twitter dans le pays.