100 000 professionnels de santé unis autour de la lutte contre le tabac. C’est l’objectif ambitieux que s’est fixé Michèle Delaunay. Elle vient de lancer un appel en ligne qui a déjà rassemblé plus de 1 500 praticiens. Du kinésithérapeute à l’aide-soignant, en passant par les médecins de divers domaine, la députée (PS) de la Gironde a visé large. Cet ex-cancérologue dénonce les conséquences sanitaires élevées de la cigarette. Chaque année 78 000 personnes meurent d’une pathologie associée au tabagisme. Le temps est venu de frapper un grand coup. Ce rassemblement pourrait bien être décisif.
Une approche plus proactive
La liste des premiers signataires témoigne bien de la volonté de balayer l’ensemble des professions de santé. Dentistes, pharmaciens, addictologues se rejoignent pour lutter contre le tabac. Malgré quelques désaccords sur la forme, la Fédération Addiction a elle aussi choisi de signer. Son président, Jean-Pierre Couteron, concède avoir hésité, à cause d' « un style quelque peu injonctif » qui n’est pas adapté à cette forme de dépendance. « Mais se mobiliser pour obtenir une politique cohérente vis-à-vis du tabagisme l’a emporté », explique-t-il. Il faut dire qu’un rassemblement de cette ampleur n’a encore jamais été obtenu.
Sur le fond, l’appel se divise en deux parties. La première engage les professionnels à agir plus contre le tabagisme. Ceux qui ont signé le document devraient se montrer plus proactifs auprès de leurs patients, particulièrement les jeunes ou encore les femmes enceintes. Dans les faits, cela passe par la promotion de l’ensemble des moyens de sevrage. Pourquoi tant de spécialités ? « On sait que le message entre vraiment dans la pratique le jour où il vient de plusieurs sources », explique Michèle Delaunay à Pourquoidocteur. Les kinésithérapeutes sont ainsi également habilités à prescrire des modes de sevrage.
L’appel aux politiciens
Les professions de santé ne sont pas les seules à être interpelées. Les décideurs politiques figurent aussi en bonne position. De fait, ce sont eux qui mettent au point les législations et les appliquent. Sur ce point, le bilan reste insuffisant. « Une dynamique s’est engagée sur le tabac, avec le Plan national de réduction du tabagisme, concède Jean-Pierre Couteron. Mais le succès est plus que relatif : le dernier bulletin épidémiologique hebdomadaire à ce sujet n’est pas extraordinaire. » Paquets neutres et molles augmentations du prix du tabac ne suffisent plus. « Il faut absolument transformer l’essai dans le prochain quinquennat », estime Michèle Delaunay.
Elus et candidats sont donc invités à faire appliquer la loi de manière plus stricte. A commencer par l’interdiction de vendre du tabac aux mineurs. Mais ça n’est pas tout : le prix du paquet de cigarette doit aussi franchir la barre symbolique des 10 euros. La députée de la Gironde veut en faire un sujet de débat à l’échelle européenne.
Alors que l’élection présidentielle se profile, Michèle Delaunay aura bien besoin du soutien de 100 000 professionnels de santé. A l’heure actuelle, le débat sur la santé est resté à la marge. La députée compte d’ailleurs envoyer aux candidats aux primaires et à la présidentielle le contenu de l’appel. Jean-Pierre Couteron attend beaucoup de leur part et n’hésite pas à dresser un parallèle avec la politique menée sur l’alcool. Le gouvernement a progressivement assoupli la loi Evin. « On espère que cela évitera les erreurs observées sur l’alcool, tranche le président de la Fédération Addiction. On espère aussi en tirer un message cohérent. » Pas sûr que cela suffise pour faire passer le paquet à 10 euros.