L’industrie ne recule devant rien pour protéger les fesses de bébé. La technologie est toujours plus avancée, au grand bonheur des parents. Mais éviter irritations et érythèmes fessiers a un prix. Il ne frappe pas seulement le porte-monnaie. Des hydrocarbures aromatiques polycycliques sont présents dans les langes jetables traditionnels. Certains sont classés « cancérigènes » par l’Union européenne. Le fabricant de couches écologiques Love and Green a publié une étude comparative en ce sens, révélée par Le Parisien. Une information à prendre avec des pincettes.
Une exposition omniprésente
« 0 % phénoxyéthanol, parabènes, chlore, colorants, petrolatum, MIT, BHT, PEG, PPG, allergènes », clame avec fierté Love and Green sur son site web. Parmi ces acronymes barbares, le petrolatum, connu sous le nom plus courant de vaseline.
Ce produit est utilisé dans les couches classiques pour éviter les irritations que peuvent développer les bébés. Mais il contient une classe des substances chimiques potentiellement nocive pour la santé : les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).« Ils sont le résultat de la combustion incomplète du carbone, décrypte le Pr Olivier Fardel, de l’Institut de Recherche sur la Santé, l’Environnement et le Travail (ISERT), contacté par Pourquoidocteur. Leurs traces se trouvent partout, même dans les viandes cuites au barbecue ou le saumon fumé. » L’alimentation est même la principale source d’exposition chez un adulte non fumeur.
Mais qu’en est-il pour les jeunes enfants ? L’étude commandée par Love and Green - que Pourquoidocteur a pu consulter - suscite le doute au premier regard. Deux formes de HAP ont été retrouvées dans un lot de couche Pampers, sur les deux testés. Il s’agit du benzo(a)anthracène et du chrysène. Ils peuvent provoquer certains cancers.
« Ce sont des produits classés cancérigènes par le Centre International de Recherche sur le Cancer », confirme le Pr Fardel. Voilà qui devrait sonner le glas pour le fabricant de couches. « Des substances cancérigènes n'avaient rien à faire dans des couches », affirme l’Association Santé Environnement France dans un communiqué.
Des seuils respectés
Les substances sont cancérigènes, certes, mais l’Union européenne a fixé des seuils de sécurité pour ces HAP. En dessous d’une dose de 0,5 mg par kilogramme de produit, les industriels peuvent commercialiser. « L’important, c’est qu’on reste dans le cadre fixé par l’Europe », juge Olivier Fardel. Ce cadre est considéré comme sûr par les comités d’experts qui ont statué. Justement, les couches Pampers ne dépassent pas le niveau de 0,2 mg/kg, qui n’est atteint qu’à une occasion. Difficile donc d’incriminer la marque sur la base de résultats… conformes.
« C’est aux pouvoirs publics de juger s’il vaut revoir ces normes. Si l’industriel les respecte, alors il faut montrer qu’elles sont mauvaises », estime le Pr Fardel.
Ces preuves ne peuvent provenir que d’une source : les études scientifiques. A l’heure actuelle, celles-ci se font rares dans le secteur. Mais surtout, elles ne portent pas sur une exposition par la peau, au niveau des muqueuses génitales et anales, chez le jeune enfant. Un flou qui relève de l’artistique. « Il n’est pas possible d’affirmer que ces couches ne sont pas dans les clous. Il faut peut-être mener des études pour voir en quoi ce produit pose problème », concède Olivier Fardel, qui laisse la main aux pouvoirs publics.
Mais un détail vaut le coup d’être noté : les traces de HAP ne sont présentes que dans l’élastique de la couche, et ses parties avant et arrière à l’extérieur. Les muqueuses n’y sont donc pas exposées directement.
« Cette polémique est complexe. Il existe de nombreux lanceurs d’alerte mais il faut aussi des arguments scientifiques », tranche le Pr Fardel. Un constat qui relève du bon sens et qui soulève une autre problématique : celle des guerres commerciales entre fabricants à coup d'études plus ou moins sériesues Les parents inquiets pourront donc se rassurer.