Si vous avez rendez-vous chez le dentiste pour un implant dentaire, il pourrait être utile, pour un temps, de prendre un bêtabloquant (médicament contre l’hypertension) et d’interrompre la prise de comprimés contre les brûlures d’estomac. Selon des données colligées par des scientifiques canadiens, on a tout intérêt à prendre certains médicaments courants et à en éviter d’autres pour augmenter les chances de réussite de l’implant dentaire.
Les conclusions de cette équipe de chercheurs de l’université McGill (Montréal, Québec) sont fondées sur l'étude de 1 499 implants dentaires posés chez 728 patients entre janvier 2007 et septembre 2013 à l’East Coast Oral Surgery Clinic de Moncton, au Nouveau-Brunswick.
Plus précisément, l'équipe a mis en place 327 implants chez 142 personnes qui prenaient un bêtabloquant pour le traitement de l’hypertension, et 1 172 implants chez 586 personnes qui ne prenaient pas de bêtabloquant.
Une action sur le métabolisme osseux
Les résultats montrent un taux d’échec de l’implantation chez les personnes traitées par un bêtabloquant de 0,6 %. A l'inverse, le taux d’échec de l’implantation chez les personnes non traitées par un bêtabloquant a été de 4,1 %.
Pour expliquer ces données, le Pr Faleh Tamimi, principal auteur de l'étude, confie dans un communiqué : « La réussite d’une intervention comme l’implantation dentaire dépend principalement de la mesure dans laquelle le tissu osseux accepte l’implant pour permettre la fusion entre la surface de l’implant et l’os vivant ».
« Certains médicaments agissent sur le métabolisme osseux et sur les processus de guérison, de multiplication et de mort des cellules osseuses, et peuvent donc influer fortement sur la réussite d’une implantation dentaire », précise-t-il. C'est visiblement le cas des bêtabloquants pris par plus de 640 millions de patients dans le monde.
Et même si ces résultats étaient attendus, les chiffres récoltés ont surpris l'équipe. « Nous avons entrepris cette étude précisément parce que nous savions que les bêtabloquants pouvaient stimuler la formation osseuse, explique le Pr Tamimi. Notre hypothèse était que cet effet pouvait réduire le risque d’échec des implants dentaires. Toutefois, nous ne nous attendions pas à une différence aussi nette du taux d’échec entre les utilisateurs et les non-utilisateurs de bêtabloquants. »
Des médicaments plus nuisibles que prévu
Mais ces scientifiques ne se sont pas arrêtés en si bon chemin. Ils ont ensuite mis en place 133 implants chez 58 personnes qui prenaient un médicament contre les brûlures d’estomac, et 1 640 implants chez 741 personnes qui ne prenaient pas de médicament contre les brûlures d’estomac.
Le taux d’échec de l’implantation chez les personnes prenant un médicament contre les brûlures d’estomac a été de 6,8 %, alors que le taux d’échec de l’implantation chez les personnes ne prenant pas de médicament contre les brûlures d’estomac a été de 3,2 %.
Face à ce constat, le Pr Tamimi commente : « Les scientifiques savaient déjà que les médicaments contre les brûlures d’estomac réduisaient l’absorption du calcium dans les os et augmentaient le risque de fracture. C’est pourquoi nous voulions préciser leurs effets sur l’intégration des implants et la guérison osseuse. Mais nous ne nous attendions pas à des effets défavorables aussi marqués ». Les chercheurs indiquent qu'il serait utile de mener des essais cliniques plus poussés et sur un plus grand nombre de patients pour analyser ce phénomène de manière plus approfondie.