Troubles obsessionnels compulsifs (TOC), anxiété, hyperactivité ou encore boulimie, ces maux caractéristique d'une souffrance psychique touchent près d'un enfant sur huit en France. Et pour leur venir en aide, la France totalise environ 13 000 psychiatres. Un chiffre non suffisant puisqu'obtenir un rendez-vous chez l'un de ces spécialistes est parfois très compliqué.
Pour inverser cette tendance et améliorer l’accès aux soins de ces jeunes, une expérimentation a été votée en première lecture jeudi 27 octobre à l’Assemblée nationale. Présentée par le gouvernement dans le cadre du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) 2017, elle vise à permettre la prise en charge de jeunes de 6 à 21 ans par des psychologues de ville avec un remboursement par l’Assurance maladie.
Elle devrait même débuter dès le 1er janvier 2017 (pour quatre ans) avec l'orientation de 2 000 jeunes vers un psychologue libéral. Ces jeunes patients seront adressés par leur médecin traitant, scolaire, ou le pédiatre. Les psychologues n'étant pas des médecins, les consultations sont, à l'heure actuelle, à la charge des familles. Et c'est ce schéma-là que souhaitent conserver les médecins, vent debout contre la mesure.
Les médecins rappellent leur cursus
Dans un communiqué publié il y a quelques jours, le Syndicat des Médecins Libéraux (SML) écrit : « Comment pouvons-nous laisser l’expertise et le suivi de nos jeunes de 6 à 21 ans entre les mains de non professionnels de santé détenant minimalement une maîtrise en psychologie ? » Et le syndicat de rappeler avec modestie le CV des praticiens : « Les psychiatres sont des médecins spécialisés, soumis au serment d'Hippocrate, et reconnus par un Diplôme d’Etudes Spécialisées qui valide les compétences très pointues de la psychiatrie (...) ils ont réalisé 10 années d’études dont 4 de spécialisation en psychiatrie incluant de très nombreux stages dans les services hospitaliers et services de garde... »
Pire, le syndicat craint que cette expérimentation ait pour ligne de mire une possible généralisation à terme. Il rappelle à ce titre les propos de la députée Michèle Delaunay, rapporteure du PLFSS 2017 : « Cette expérimentation doit permettre de savoir si l’Etat doit prendre en charge les consultations des psychologues ». Le Dr Éric Henry, président du SML, conclut : « Comment la logique comptable peut prévaloir sur la qualité du traitement des souffrances psychiatriques de notre jeunesse ? »
Même son de cloche du côté du président du Syndicat des Psychiatres Français, le Dr Maurice Bensoussan, lui tranche le débat sans concession : « le diagnostic doit rester à nous ». Un mot d'ordre largement repris par ses confrères dans les médias.
Améliorer la prise en charge précoce
Interrogée par Allodocteurs, Michèle Delaunay a aussitôt rétorqué que l'expérimentation vise pour le moment à « vérifier si les psychologues de ville ont une utilité qui peut justifier une prise en charge par l'Assurance maladie ». Elle a ajouté : « il s'agit aussi d'améliorer la prise en charge précoce des enfants. Mais si les maux des jeunes persistent, ils seront bien évidemment transférés devant des médecins spécialisés, tels que les psychiatres ». « Lors d'une souffrance terrible constatée par exemple par le médecin généraliste, l'enfant sera immédiatement renvoyé vers ces praticiens », conclut-elle.