En 2014, la Cour d'Assises de la Seine-Saint-Denis a condamné à cinq ans de prison, dont deux ans ferme, Patrick, un homme de 51 ans ayant contaminé sciemment sa compagne avec le virus du sida, alors qu'il lui cachait sa maladie. Et depuis cette décision, les affaires se multiplient. Les victimes, auparavant silencieuses, ont la langue qui se délie. En espérant que la précédente affaire fasse jurisprudence.
C'est le cas dans le cité catalane de Perpignan. Un homme y a été arrêté car il est soupçonné d'avoir transmis volontairement l'hépatite C à trois femmes avec lesquelles il a eu des rapports sexuels. Les victimes ont toutes porté plainte contre cet homme de 56 ans, mis en examen et placé sous contrôle judiciaire, pour tentative d’empoisonnement et administration de substance nuisible, selon le journal L’Indépendant.
"Aucune femme ne voudrait coucher avec lui"
Tout commence en 2015, lorsque l'une des trois femmes découvre, après un test de dépistage, qu'elle est atteinte de l'hépatite C. Elle demande alors à son conjoint de l'époque de faire également un test. Ce dernier s'exécute, tout en dissimulant une partie des résultats. Il nie au final être à l'origine de la contamination de sa compagne.
Jusqu'au jour où cette dernière insiste, l'homme reconnaît alors ses torts. Comme explication à son mensonge, il se défendra en indiquant que s'il avait révélé sa pathologie « aucune femme ne voudrait coucher avec lui ».
D'autres victimes potentielles
S'en suivra plusieurs auditions au commissariat de Perpignan, puis une perquisition à son domicile. Celle-ci a permis aux policiers de découvrir les résultats d’une analyse de sang, corroborant les dires de la victime. Malheureusement, deux autres conquêtes ont par la suite été identifiées par les forces de l'ordre. A ces deux femmes, il avait aussi caché sa maladie afin d’avoir des relations sexuelles non protégées.
Des analyses de sang sont désormais en cours afin de déterminer si les deux femmes ont également été contaminées. Les enquêteurs sont, par ailleurs, à la recherche d’autres victimes potentielles de l'homme, laissé libre pour le moment.
La jurisprudence protège les victimes
En France, la situation sur la transmission volontaire d'une pathologie est ambiguë. Sur le papier, aucun texte de loi ne punit les séropositifs en cas de transmission du VIH. Un projet de loi a été adopté par le Sénat en 1991. Mais l’Assemblée nationale a supprimé ce texte, inclus dans la réforme du code pénal, après la mobilisation de plusieurs associations dont ActUp Paris. « La pénalisation de la transmission sexuelle du VIH/sida ne nous semble pas constituer une réponse de santé publique, au contraire elle pourrait constituer un frein à des politiques de dépistage », argumentait l’association, qui soulignait le risque de déresponsabiliser les séronégatifs.
Mais la jurisprudence est autre. L’année 2004 marque le premier cas de poursuites judiciaires dans l'Hexagone. Christophe Morat, alors âgé de 31 ans, a enchaîné les relations sexuelles sans informer ses partenaires de son statut sérologique. Il sait pourtant, depuis 1997, qu’il est séropositif. Il est condamné à 6 ans d’emprisonnement. D’autres condamnations se sont appuyées sur un délit précis : l’administration de substances nuisibles – ici le VIH. Un texte de loi jusqu’ici limité à des substances pharmacologiques. La peine la plus lourde à ce jour, en France, concerne un homme de 40 ans condamnée à 12 ans de réclusion. Il a été reconnu coupable d’« administration de substance nuisible avec préméditation ayant entraîné une infirmité permanente ou une atteinte psychique ».