Margaret Chan, directrice générale de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), cèdera son siège en mai prochain. Pour lui succéder, la France soutient la candidature d'un de ses compatriotes, le Français Philippe Douste-Blazy. L'ex-ministre de la Santé (2004-2005) sous la présidence de Jacques Chirac, a commencé à dévoiler ses cartes de son programme.
« Nous avons l'habitude de dire que l'espérance de vie augmente depuis 40 ans. Mais elle va commencer à baisser, parce que si vous avez 20 % de diabétiques (dans certaines régions), alors qu'il n'y en avait que 5 % il y a 20 ans, vous allez commencer à avoir des complications », a-t-il déclaré à l'Agence France Presse (AFP). Nous n'avons pas les mêmes normes concernant le sucre, le sel et les graisses dans tous les pays du monde. C'est à l'OMS de faire ça. Dans les pays du Golfe, 75 % de la population a une surcharge pondérable et est déjà à 20 à 22 % de diabète », a-t-il regretté en concluant que « c'est une catastrophe statistique, mais ça va devenir progressivement une priorité politique ».
Augmenter le prix des boissons sucrées
Loin de tout fatalisme, Philippe Douste-Blazy se déclare ainsi favorable à une hausse du prix du tabac et des boissons sucrées, « seule chose qui fonctionne aujourd'hui », selon lui . « L'OMS a dit qu'il y aura plus de maladies non transmissibles que de maladies infectieuses en 2030, pour la première fois dans l'histoire de l'humanité. C'est la première cause de décès dans le monde », a rappelé ce cardiologue de formation.
Celui qui est aujourd'hui conseiller spécial à l'ONU sur le Financement innovant du développement envisage également de restructurer l'Organisation, en créant un département dédié aux financements innovants, sur le modèle d'UNITAID qu'il préside. Fondée par la France et le Brésil grâce à une taxe sur les billets d’avion, l’organisation permet de financer la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme à travers la prévention, le traitement et le diagnostic.
Un modèle qu'il aimerait reproduire puisqu'il envisage de mettre à contribution certains pays, en leur prélevant une taxe sur chaque baril de pétrole, chaque gramme d'or ou livre d'uranium pour financer leur budget de santé publique. L'ancien ministre de la Culture et des Affaires étrangères veut également convaincre les laboratoires de continuer à produire des médicaments anciens mais toujours efficaces et à développer des médicaments qui ne sont pas rentables. « Il faut que l'OMS mette en place des garanties d'achat », a-t-il évoqué auprès de ces journalistes.
Les adversaires du Français
Dans cette compétition pour la tête de l'OMS, Philippe Douste-Blazy est opposé à trois hommes et deux femmes. L'un de ses rivaux principal est le Dr David Nabarro qui met en avant son expérience au sein de l'OMS où il travaille depuis 1999 et où il a notamment été en charge de la lutte contre le virus Ebola. « Vous devez vraiment connaître le système de l'intérieur si vous envisagez de le changer », a-t-il dit lors d'une conférence de presse. Un tacle en direction du candidat français.
Ce à quoi ce dernier a aussitôt répondu en reconnaissant qu'il n'était pas du sérail. Mais l'ancien maire de Toulouse voit plutôt cela comme un avantage : « s'il faut quelqu'un capable d'enseigner la santé publique à des étudiants, qui a eu des responsabilités de santé publique dans un pays comme la France, qui a été capable de créer une organisation internationale qui soigne aujourd'hui des dizaines de millions de personnes après avoir baissé le prix des médicaments, alors je commence peut-être à être un modeste candidat qui peut intéresser », a-t-il estimé auprès de l'AFP.
En janvier, le Conseil exécutif de l'OMS désignera trois candidats qui seront soumis au vote de l'Assemblée mondiale de la Santé en mai.
Un candidat médecin
Philippe Douste-Blazy est issu d’une formation médicale : interne à Toulouse (Haute-Garonne), il y a également exercé en tant que cardiologue. C’est aussi là-bas qu’il a obtenu le titre de professeur en médecine, en 1988.
Sa carrière médicale s’est progressivement intriquée avec la vie politique. Il est ainsi ministre de la Santé à deux reprises, de 1993 à 1995 et de 2004 à 2005. C’est lors de son second mandat qu’il entame une réforme de l’Assurance maladie, qui verra notamment l’apparition de la franchise à un euro.