La publication fournit un éclairage sur les circonstances qui l'entourent. En janvier, un essai clinique mené à Rennes tournait au drame, avec le décès d’un participant et l’hospitalisation de cinq autres volontaires, dont quatre ont présenté des lésions cérébrales.
Alors qu’une enquête judiciaire est en cours et que la communication autour de cet essai clinique a été fermement prise en main par le ministère de la Santé, l’équipe médicale du CHU de Rennes qui a pris en charge les victimes a décidé de sortir du silence. Dans le prestigieux et incontestable New England Journal of Medecine, elle publie en effet les tableaux cliniques de plusieurs participants.
Mêmes atteintes
« Au regard des dimensions humaines, scientifiques et éthiques de cet événement tragique, avec l’accord des patients ayant été hospitalisés et de la famille du patient décédé, les équipes médicales ont souhaité, à travers cette publication, partager avec la communauté scientifique internationale les données cliniques et radiologiques du patient décédé et celles de trois patients exposés aux plus fortes doses du produit », précise ainsi le CHU de Rennes dans un communiqué.
Les données confirment que la toxicité est bel et bien liée à la molécule BIA 10-2474, testée pour la première fois sur l’être humain, même si le « mécanisme sous-jacent » de cette toxicité « reste inconnu ». Par ailleurs l’effet toxique semble dose-dépendant. Les patients concernés ont reçu la dose la plus élevée, soit 50 mg par jour.
Les IRM cérébraux montrent les mêmes atteintes non spécifiques chez tous les participants ayant subi des lésions, accompagnées de micro-hémorragies dans les zones atteintes (le pont et les deux hippocampes). Elles excluent ainsi l’hypothèse d’un AVC ou d’un autre trouble ischémique comme origine du décès, ce qui a été suggéré au cours de l’enquête.
Action au-delà de la cible
Cet essai clinique avait pour but d’augmenter les taux d’endocannabinoïdes afin de mettre au point une molécule à visées multiples (anti-stress, anti-douleur, anti-inflammatoire), bien que les essais de phase 1 ne visent qu’à évaluer la toxicité et non l’efficacité.
Or, les auteurs notent qu’une augmentation des niveaux d’endocannabinoïdes n’a jamais été associée, dans la littérature, à des effets toxiques sévères dans le système nerveux central. « Cela suggère la possibilité d’une action au-delà de la cible visée par la molécule, et liée à sa faible spécificité », peut-on lire dans la publication.