L’écologie politique a du bon. Elu en 2014 à la mairie de Grenoble (Isère), Eric Piolle (EELV) a multiplié les actions pour favoriser un comportement plus responsable. La dernière en date ressuscite la vignette sur les véhicules à moteur. Depuis le 1er novembre, l’agglomération peut limiter la circulation de certains modèles en cas de pic de pollution durable. « Une mesure avant tout sociale », selon l’adjointe à la Santé de la mairie, Mondane Jactat. Sa ville est la première à franchir le pas.
« Il y a urgence »
Située au cœur du sillon rhodanien, Grenoble est loin d’être épargnée par la pollution. La ville étouffe régulièrement et dépasse les seuils recommandés par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). En moyenne, 18 microgrammes de particules fines par mètre cube d’air sont relevés dans l’agglomération. « Les conséquences sur la santé sont dramatiques », avance Mondane Jactat.
3 à 10 % des nouveaux cas de cancer du poumon sont attribués à cette atmosphère contaminée. Il est à l’origine de 114 décès par an. S’y ajoute un impact au long cours sur les maladies chroniques et un plus petit poids de naissance chez les nourrissons exposés in utero. La conclusion est simple pour l’adjointe au maire en charge de la santé : « il y a urgence à agir. »
Cette action se décline sous la forme d’une limitation graduelle. Lors d’un pic de pollution, la mesure est déployée progressivement. Après deux jours, la vitesse sur les grands axes de circulation est limitée, et passe de 90 km/h à 70 km/h. Si l’épisode dure cinq jours, certains véhicules se voient interdire de rouler. « Les plus polluants, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas de certificat qualité de l’air, ne pourront pas circuler », explique Mondane Jactat.
Un recul rapide
Le certificat prend la forme d’une vignette, délivrée par le ministère de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer. D’un coût de 4,18 €, elle est remboursée sur simple demande. Six pastilles peuvent être adressées en fonction des émissions du véhicule. S’il est trop polluant, aucun certificat n’est attribué. 8 % des modèles en circulation sont concernés par cette situation.
Les piétons forcés bénéficient tout de même d’un geste de la part de la mairie de Grenoble : elle leur propose un ticket gratuit qui leur permet de circuler toute la journée en transport en commun. Une manière de compenser les pertes pour les plus défavorisés, qui sont aussi les principaux propriétaires des véhicules polluants. Et d’obtenir des résultats rapides. « Quand on retire les 8 % les plus polluants, les émissions diminuent de 10 % », souligne Mondane Jactat.
194 villes adeptes
Le dispositif monte en charge après sept jours consécutifs de pollution : les certificats de catégorie 4 et 5 se voient également interdire toute circulation dans l’agglomération grenobloise. « Cette fois, on met en place la gratuité des transports en commun jusqu’à la fin de l’épisode », précise Mondane Jactat.
La mesure n’est pas nouvelle : en mars 2014, 194 zones ont adopté ce système dans 9 pays différents. La championne est de loin l’Italie, avec 94 villes membres, suivie de près par l’Allemagne et les Pays-Bas. Grenoble a toutes les chances d’obtenir de réels résultats au vu de son infrastructure nettement favorable. Pistes cyclables, aires piétonnes et transports en commun sont très bien développés dans l’ensemble de l’agglomération.
Le dispositif présente l’avantage de se montrer plus juste que celui adopté par Paris. La capitale française a recours à la circulation alternée en cas de pic de pollution prolongé. Ce qui ne permet pas d’écarter les véhicules les moins propres, bien que l’impact soit réel sur la qualité de l’air.