On se souvient de la célèbre phrase de Napoléon, « ne te lave pas j’arrive », envoyée à Joséphine. En réalité, l’Empereur n’aura fait que reprendre l’invite du bon roi Henri IV à sa maîtresse Gabrielle d'Estrées. Il fut donc un temps où les fluides corporels, la sueur et les émanations diverses étaient en odeur de sainteté. Parfaitement admis, voire recherchés.
Plus que cela, « la perception intime de la transpiration d’une personne peut devenir la première cause d’un amour passionné » rapporte le psychiatre et chercheur en psychobiologie Serge Stoléru dans son livre Un cerveau nommé désir ( Odile Jacob, 2016).
Exemple célèbre, celui d’Henri III qui s’essuya la figure avec la chemise trempée de sueur de Marie de Clèves. On connaît la suite… Le roi conçut pour la princesse de Condé une violente passion. A la mort en couches de cette dernière à l’âge de 21 ans, il coudra des têtes de mort sur ses vêtements pour signifier le drame absolu de la disparition de sa bien aimée…
Des ingrédients essentiels du désir
Les effluves corporelles font partie de notre condition de mammifère. Nous avons une peau, des poils, un sexe et nous transpirons. Tous les follicules pileux réunis sur notre corps produisent l’équivalent de 12 km de poils par an. La pilosité attire l’œil sur les zones érogènes et flatte les narines de notre partenaire, car les poils sont des postes avancés diffuseurs d’ odeurs.
Au niveau du pubis ou des aisselles, les glandes sudoripares ne sécrètent pas une sueur banale mais émettent des sécrétions laiteuses qui excitent la libido. Le Dr Serge Stoléru relate cette expérience. Chez des hommes à qui on a fait respirer des odeurs de sécrétions provenant de la vulve et des aisselles de femmes en milieu de cycle, le taux de testostérone salivaire (hormone mâle) grimpe significativement. « Respirer les tampons porteurs d’odeur en période pré-ovulatoire a suscité un état de désir et d’excitation sexuelle, indique le chercheur. En revanche, aucun effet sur le désir n’a été observé pour les tampons provenant de femmes en fin de cycle menstruel ». Tout se passe donc comme si, au plan de l’Evolution humaine, les odeurs avaient une vertu aphrodisiaque nécessaire pour la procréation et le désir.
Se laver ou pas ?
Depuis quelques années, notre odorat est pourtant devenu chatouilleux et exigeant. Certains s’acharnent ainsi à gommer tout effluve avant l’amour ou aussitôt après à l’aide de douches répétées et déodorants intimes.
Avant l’amour, on peut comprendre qu’un minimum de propreté soit au rendez-vous, mais sans excès non plus. Le sexe féminin sera non seulement plus odorant mais plus lubrifié, ce qui facilitera les préliminaires. « Il y a, estime Julia Palombe, auteure d’ Au lit citoyens (éditions Hugo&Cie), une part d’acceptation de soi qui est inévitable pour aspirer à une vie sexuelle pleine d’entrain. Et cela passe nécessairement par l’acceptation des fluides sexuels et de tout ce qui émane du corps ».
Après l’amour, certain(e )s sont tentés d’éliminer toute trace de sueur et de sperme à l’aide d’une douche salutaire. Est-ce à cause de la trace du désir ou de fragments d’animalité si manifeste sur eux ? A cause de la peur des microbes ou de la « saleté » ? Le liquide séminal est sain, argumentent les gynécologues. Il n’y a aucun danger à le conserver en soi.
De plus, le vagin est « autonettoyant », certaines cellules, les bacilles de Döderlein, sont prévues pour faire le ménage et assurer la défense contre les germes les plus banals. Se laver n’est donc pas une urgence absolue. On peut attendre un peu ou des heures sans…danger.
L’odeur vaginale varie en fonction des moments du cycle. Elle peut être exacerbée après les règles notamment. Cependant, l’odeur n’est pas désagréable en soi. L’hygiène intime quotidienne suffit largement. Idem pour l’homme, l’odeur du gland peut être forte et musquée, c’est banal et normal. Une toilette quotidienne suffit.
Après un rapport sexuel, l’odeur vaginale peut s’avérer franchement désagréable (odeur de poisson pourri). Il se produit dans ce cas une réaction biochimique avec le sperme qui contient de l’azote. Un déséquilibre de la flore intime peut être en cause. Certaines bactéries ( notamment Gardnerella vaginalis) se développent au détriment des autres. Le problème se règle facilement à l’aide d’un antiparasitaire.