Depuis plus de 30 ans, développer un traitement, voire un vaccin, contre le VIH est un des Graal de la médecine. Chaque nouvelle recherche dont les résultats semblent aller dans le bon sens se retrouve de fait rapidement médiatisée : trop rapidement ? C’est la question que l’on peut se poser face à la nouvelle qui a été reprise, depuis quelques jours, par de nombreux médias. Certains titres, comme celui du point.fr, n’hésitent pas à parler d’ « espoir de guérison » !
Quelle molécule, quelle technique, quelle découverte peut provoquer un tel engouement ? Les travaux dont il est question sont menés par deux chercheurs israéliens de l’université hébraïque de Jérusalem, nous apprend Danièle Kriegel, correspondante du Point sur place. Selon la journaliste, l’idée d’Abraham Loyter et Assaf Friedler est d’utiliser une peptide qui favoriserait l’entrée dans les cellules de nombreuses copies du VIH. Cette invasion massive pousserait la cellule à « s’apercevoir qu’elle est malade », puis à se suicider. Une mort cellulaire programmée, connue sous le nom d’apoptose.
Sans aucun doute, la méthode est innovante. Mais est-on vraiment en droit d’en attendre des espoirs de guérison ? Sur la base de quoi les chercheurs estiment-ils l’efficacité de l’approche ? Un essai clinique ? Des tests sur des modèles animaux ? Ou in vitro, des cellules humaines, peut-être ? Non, ils ont « simplement » ajouté le peptide en question dans des tubes de sang humain ! Après huit jours, le nombre de copies du virus dans les tubes avait baissé de 97 %, expliquent-ils. Des données certes enthousiasmantes pour des scientifiques face à des résultats préliminaires. Sûrement moins pour les patients !
Le chemin de la recherche biomédicale est long et tortueux. Il y a loin du tube à essai au patient. Combien de molécules prometteuses in vitro se sont révélées toxiques une fois injectées à des animaux ? Combien de traitements qui avaient montré des résultats prometteurs chez l'animal n'ont pas montré d'efficacité chez l'homme ? Le temps de la recherche est long, trop, bien évidemment, face à l'attente de patients. Mais par respect pour ces derniers, il est nécessaire de savoir raison garder, et de soutenir les efforts des milliers de scientifiques qui consacrent leurs travaux à la lutte contre le VIH, tout en respectant les espoirs des patients.