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Metformine

Progéria : un antidiabétique pourrait traiter les "enfants-vieillards"

Par Audrey Vaugrente

La metformine, antidiabétique courant, serait capable de traiter la progéria. Cette maladie génétique très rare provoque un vieillissement prématuré des enfants.

CATERS NEWS AGENCY/SIPA

Leur peau est fripée, leurs cheveux chutent et les douleurs articulaires sont omniprésentes. Et pourtant, ces malades ont moins de 12 ans. Ce vieillissement prématuré est dû à une maladie génétique très rare, la progéria. La mutation qui la cause réduit considérablement l’espérance de vie : les patients dépassent rarement l’âge de 13 ans. Une équipe de l’Inserm, en lien avec l’AFM-Téléthon, a peut-être trouvé une manière de ralentir ce déclin accéléré. Elle réside dans un médicament très courant, un antidiabétique oral connu sous le nom de metformine. La découverte est décrite dans Aging and Mechanisms of Disease, une revue du groupe Nature.

Cibler la production

Guérir les « enfants vieillards », voilà un casse-tête sur lequel plus d’un scientifique s’arrache les cheveux. La solution, présentée par l’équipe française, semble pourtant simple. Mais ce n’est qu’en 2012 que l’idée a émergé, après la publication d’une étude sur l’impact génétique de la metformine. Car la progéria est une maladie provoquée par une mutation génétique précise : elle se produit sur le gène LMNA. « Le gène code normalement pour des protéines lamines A et C », explique l’Inserm. Elles assurent l’intégrité des noyaux des cellules.

Dans le cas du syndrome de Hutchinson-Gilford, l’autre nom de la progéria, la protéine exprimée n’est pas complète, et surtout toxique. Elle déforme le noyau des cellules et provoque un vieillissement précoce. Elle n’est normalement présente dans l’organisme qu’à partir de 50 ou 60 ans. « Aujourd’hui, les médicaments à l’essai sur ces patients visent, soit à détruire la progérine, soit à en bloquer la toxicité, mais aucun d’entre eux n’a d’effet sur sa production, explique le Dr Xavier Nissan. C’est ce que nous avons cherché à identifier dans cette étude. »

Une réduction des protéines toxiques

La progéria est extrêmement rare : seuls trois cas sont connus en France, 25 sur le continent européen. La maladie touche une naissance sur 4 à 8 millions, selon l’Inserm. Développer un nouveau médicament pourrait donc s’avérer peu rentable. Au lieu de cela, les signataires de cette étude ont passé en revue des molécules déjà existantes. La metformine est ressortie comme une piste particulièrement intéressante : cet antidiabétique régule l’expression de plusieurs centaines de gènes.

Restait à vérifier que le médicament était efficace contre la maladie. Les chercheurs ont donc utilisé des cellules prélevées chez des patients atteints du syndrome de Hutchinson-Gilford. « Nous avons pour cela utilisé la technique de reprogrammation pour renvoyer à l’état souche des cellules de patients. Une fois rajeunies, ces cellules souches (ou iPS) ont été transformées en cellule de peau, d’os ou de vaisseaux sanguins », explique Xavier Nissan. Une faible dose de metformine leur a été appliquée.

L’antidiabétique est bel et bien efficace. Il inhibe la protéine qui participe à l’expression de la progérine à hauteur de 40 %. Mieux : la présence de la progérine dans les cellules est réduite jusqu’à 50 %. La déformation des noyaux ne s’observe plus. Pour le Pr Nicolas Levy, qui signe également ces travaux, c’est incontestablement une bonne nouvelle. « Ces résultats suggèrent une nouvelle approche thérapeutique, seule ou combinée à d’autres molécules, pour le traitement de la progéria dont le bénéfice devra désormais être évalué sur des modèles animaux de ce syndrome. »