Face au mouvement de désobéissance tarifaire engagé par les médecins libéraux il y a plusieurs mois, l'Assurance maladie est décidée à ne pas se laisser faire. Interrogée par Pourquoiodocteur à ce sujet, la CNAM rappelle que « la revalorisation est prévue au 1er mai prochain ». Et elle affirme que « toute anticipation de cette date conduira logiquement les caisses à engager les procédures prévues, et à appliquer le cas échéant les sanctions prévues ».
Celles-ci comprennent notamment la suspension de la prise en charge des cotisations sociales des médecins dont la contrepartie est le respect des tarifs opposables. Mais elles peuvent aller jusqu'à un déconventionnement temporaire du médecin poursuivi. Dans ce cas, les patients ne sont plus remboursés de leurs consultations.
Des contraintes juridiques s'imposent
Pour sa défense, l'Assurance maladie explique que le calendrier des revalorisations tarifaires se heurte à des contraintes juridiques qui ne permettent pas de les mettre en œuvre plus tôt. « Il faut six mois, une fois le texte de la convention promulgué au JO depuis le 23/10/2016, avant toute mise en œuvre de mesure conventionnelle qui comporte une implication tarifaire. Les syndicats à la table des négociations sont parfaitement au courant de cette contrainte juridique et ils ont adopté cette convention à la majorité de leurs membres (53% des voix) », souligne la CNAM.
Pour cette raison, elle n'hésite pas à tacler ces derniers. Sont visés bien évidemment les signataires de la convention, c'est-à-dire MG France, la Fédération des Médecins de France (FMF), et le syndicat LE BLOC. Et la plume de l'institution devient acerbe : « Les syndicats qui encouragent des médecins à surcoter la consultation de 2 euros ne respectent pas l’accord conventionnel signé le 25 août ».
L’Assurance maladie se veut même menaçante, en indiquant qu'elle continuera de veiller strictement au respect des règles conventionnelles. « C’était le cas depuis 2015, dès le premier appel des syndicats et ce sera encore le cas pour les mois à venir » prévient-elle. Elle conclut : « Quand on se réclame de la convention, il faut en respecter les droits et les devoirs ».
Des médecins bretons font de la résistance
Malgré cet avertissement la contestation s'amplifie. Deux grands syndicats de médecins libéraux (CSMF, MG France) ont même récemment réaffirmé publiquement leur soutien à ces médecins. Côté généralistes, ils étaient seulement 675 (sur plus de 54 000) à pratiquer un dépassement d’au moins deux euros, selon une évaluation effectuée début 2016.
Le sujet est revenu dans l'actualité depuis quelques jours à cause de deux villages bretons qui ont engagé un bras de fer avec leur CPAM sur cette question des dépassements d’honoraires. Romillé et Val-d’Izé en Ille-et-Vilaine sont situés à quelques kilomètres de Rennes, chef-lieu de la région Bretagne. Ces communes ne sont pas considérées comme des déserts médicaux. Mais la zone est fragile : une seule maison de santé pluridisciplinaire existe à Val-d’Izé et quatre généralistes seulement y exercent leur profession.
« Nous sommes sur un territoire de 3 500 à 5 000 patients, et je suis le seul médecin senior installé », soulignait Jean-Luc Pontis dans Pourquodocteur. Pour rentrer dans leurs frais et redonner de l'attractivité à leur profession, beaucoup de médecins là-bas ont fait le choix de coter au-delà des 23 euros encore en vigueur. En réplique, la CPAM a commencé à leur envoyer des mises en demeure. Les convocations auprès de la Commission Paritaire Locale (CPL) vont suivre.