Une enquête préliminaire a été ouverte, vendredi 18 novembre, par le pôle santé publique du Parquet de Paris pour « homicides involontaires et blessures involontaires » après la mort presque simultanée au CHU de Nantes de trois patients.
Ces patients, âgés de 61 à 65 ans, étaient atteints d’un cancer des cellules sanguines (lymphome), et traités par chimiothérapie intensive et autogreffe depuis la fin d’octobre. Ils sont morts entre le 10 et le 13 novembre de « complications graves ». Un quatrième, qui bénéficiait du même traitement, âgé de moins de 40 ans, se trouve en réanimation depuis mardi 15 novembre.
Prévenue par l'Agence régionale de santé des pays de la Loire le jeudi 17 novembre, la ministre de la Santé a immédiatement diligenté à Nantes une mission de l’Inspection générale des services (Igas). Cette dernière devra rendre ses premières conclusions d’ici à sept jours.
Des tensions d'approvisionnement
S'il est pour l'instant impossible de déterminer la raison de ces trois décès, les enquêteurs s’intéressent particulièrement au cocktail de médicaments administré à ces patients dans le cadre de leur chimiothérapie. Il comprenait « le médicament cyclophosphamide en remplacement du médicament melphalan généralement utilisé », a précisé le ministère de la Santé.
Cette substitution n'a toutefois rien d'exceptionnelle, puisqu'elle est validée par la communauté médicale. Elle est liée à des tensions d’approvisionnement au niveau européen du melphalan. D'ailleurs, la ministre de la Santé a déclaré devant le Sénat vendredi que « à ce stade, rien ne permet d'accuser la cyclophosphamide, traitement validé par la communauté médicale et utilisé depuis des années ». Le spectre des « causes potentielles est large », a-t-elle ajouté en citant comme causes possibles « médicament, protocole, mode d'administration... ».
Aucun effet indésirable n’a été détecté chez un cinquième patient, qui bénéficiait du même traitement avec la même préparation et selon le même protocole, selon Benoît Vallet, directeur général de la Santé (DGS). Les premières remontées des centres régionaux de pharmacovigilance recueillies par l’Agence nationale de sécurité du médicament n’ont par ailleurs fait état d’aucun accident similaire en France.
Des complications cardiaques connues
Ce médicament est développé par le groupe pharmaceutique américain Baxter sous le nom d'Endoxan. Une porte-parole du groupe a précisé que trois produits d'autres laboratoires faisaient partie du protocole de chimiothérapie. Elle a aussi rappelé que l'Endoxan, mis sur le marché en France depuis 1994, est utilisé couramment dans les hôpitaux.
Pourtant, selon Benoît Vallet, l'Endoxan est « connu pour donner des complications cardiaques, très rares, mais répertoriées ». Ce médicament a donné pour trois patients « un effet cardiaque intense, conduisant aux décès ». « La séquence de trois patients qui décèdent en quelques jours (...) nous amène effectivement à penser que nous sommes dans une situation pas habituelle », a-t-il dit sur France Inter.