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10% de chômeurs supplémentaires

VIH : les séropositifs de plus en plus discriminés au travail

Par Julian Prial

Une étude française révèle que les séropositifs ont de plus en plus de mal à s’insérer sur le marché du travail, malgré l’amélioration des traitements et de leur prise en charge.

LODI FRANCK/SIPA

C'est ce qu'on appelle couramment la double peine. Les personnes infectées par le VIH ont plus de mal que les autres à trouver un emploi. Une discrimination qui tend à s’amplifier depuis plusieurs années, malgré l’amélioration des traitements. C’est ce que révèle une étude financée par l’Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS), dans laquelle les auteurs ont comparé le taux de chômage de ces personnes à celui de la population générale entre 2003 et 2011.

Le postulat de départ de cette équipe Inserm (1) était le suivant : alors qu’une bonne partie de la population française a souffert des conséquences de la crise économique de 2008, il n’était pas illogique d’assister à une hausse du chômage chez les personnes séropositives. Pour savoir si cette augmentation était effectivement liée à la crise, les chercheurs ont comparé ces taux de chômage à ceux de la population générale, en utilisant les données de l’Insee.

16 % des séropositifs au chômage  

Et les résultats sont sans appel. Le taux de chômage des séropositifs a augmenté plus vite qu'en population générale au cours des dernières années. Alors que la différence entre les deux groupes était de 7 % en 2003, elle est passée à 10 % en 2011 ! Ainsi, le taux de chômages des personnes infectées par le VIH était de 12,6 % en 2003 contre 15,8 % en 2011. Et cela alors que sur la même période, la prise en charge des malades s'est nettement amélioré : 95,5 % d’entre eux montraient une charge virale contrôlée en 2011, contre 77,7 % en 2003. « Les progrès médicaux ne se sont pas traduits par une amélioration de la situation d’emploi pour ces personnes », conclut Margot Annequin, responsable de ces travaux publiés dans PLoS One (2).

Plusieurs pistes sont évoquées pour expliquer ce phénomène. Parmi elles, le fait que la maladie est mieux soignée. « Les malades sont en meilleure santé, de sorte qu’ils bénéficient plus difficilement du dispositif de maintien dans l’emploi qui octroie un taux de handicap ». Mais comme toute personne atteinte de pathologie chronique, elles ont parfois besoin de faire une pause dans leur activité professionnelle pour leurs soins. « Le retour à l’emploi est alors difficile dans un marché très compétitif, et avec la peur que l’infection se sache », déplore Margot Annequin.

Une double discrimination 

La scientifique évoque un autre facteur possible, le profil de la population des personnes vivant avec le VIH qui a évolué. Plus de 31 % d'entre elles sont des personnes d’origine sub-saharienne, contre 21 % en 2003. Et elles peuvent être confrontées à davantage de discrimination à l’embauche, en raison de leur origine étrangère ou de la couleur de leur peau.

« Les facteurs sociaux et de santé sont imbriqués quand il s’agit du VIH. Néanmoins, après ajustement des résultats, un écart persiste entre la situation la population générale et celle des personnes vivants avec le virus, vis-à-vis du chômage. Ces observations posent donc bien la question de l’adaptation du dispositif de maintien dans l’emploi pour ces dernières », conclut Margot Annequin.

(1) Unité 1136 Inserm/UPMC, Institut Pierre Louis d'épidémiologie et de santé publique, Paris M

(2) Annequin M, Lert F, Spire B, Dray-Spira R. Increase in Unemployment over the 2000’s: Comparison between People Living with HIV and the French General Population. PLoS One. 2016;11: e0165634