Les anti-IVG devront désormais annoncer la couleur sur Internet. L’Assemblée nationale a adopté, ce 1er décembre, l’extension du délit d’entrave à l’avortement. Les supports numériques sont désormais concernés par cette disposition. Elle vise particulièrement les sites qui véhiculent des informations partielles ou fausses sous couvert d’objectivité. Ceux-ci devront modifier leur contenu pour afficher clairement leur opposition à l’interruption volontaire de grossesse. Dans le cas contraire, ils encourent deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.
Des internautes moqueurs
« La liberté d’opinion n’est pas le droit au mensonge », a rappelé Laurence Rossignol. La ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes a ardemment défendu le projet de loi soumis par Catherine Coutelle (PS). Sur les bancs de l’Assemblée, le débat était pour le moins vigoureux. Le camp des Républicains s’est nettement opposé à une telle évolution de la loi, au nom de la défense de la liberté d’expression. « Ce qui est choquant, c'est votre vision moralisatrice, donneuse de leçons, qui décrète ce qui est bien et ce qui ne l'est pas », a ainsi lancé Dominique Tian. Ce député s'était quelques jours plus tôt fait le relais de « l’appel des évêques ».
Sur Twitter, des internautes n’ont pas manqué de noter quelques incohérences au sein de l’hémicycle droit. A la tribune, seuls des élus masculins ont défendu leurs positions.
La majorité socialiste s’est montrée ferme et déterminée. Laurence Rossignol a souligné son attachement à la liberté d’expression… mais aussi à la transparence. Des « groupuscules anti-IVG (…) avancent désormais masqués », a indiqué la ministre. De fait, les sites anti-IVG se montrent créatifs pour se donner un aspect respectable, voire gouvernemental : mise en place d’un numéro vert, reprise des codes visuels… Une tromperie manifeste, aux yeux des élus de gauche.
Lutter contre les pressions psychologiques
Les textes officiels sont clairs de leur côté. Le délit d’entrave, fondé en 1993 et progressivement enrichi, punit toute personne qui veut empêcher l’accès à une IVG par des moyens physiques ou des pressions psychologiques. Le délit d’entrave numérique s’appuie sur ce dernier point : au travers d’un semblant d’objectivité, les sites en question dissuadent et culpabilisent les femmes qui se renseignent.
Le meilleur exemple de cette tromperie reste le site ivg.net – souvent cité. « Toutes les infos sur l’IVG dont vous avez besoin : médicales, psychologiques, juridiques ou sociales », avance l’en-tête du site. Les couleurs sont épurées, l’apparence neutre. Mais quelques éléments mettent la puce à l’oreille. Des femmes mélancoliques, en proie au doute, illustrent bon nombre d’entrées. L’article « IVG et santé de la femme » se contente de lister les complications possibles, bibliographie à l’appui. L’onglet « Santé est d’ailleurs sous-titré « Les risques de l’IVG ». Mais seule une analyse froide et poussée permet de s’en assurer. Ce qui n’est pas forcément le cas d’une femme confrontée à une grossesse inopinée.
Un site a été fondé par le ministère de la Santé - ivg.gouv.fr. Bien référencé, il peine tout de même à atteindre les premières lignes des requêtes.