La salle de travail serait-elle le théâtre de tous les abus ? Les épisiotomies injustifiées sont régulièrement dénoncées sur les réseaux sociaux. Une autre pratique a trop souvent droit de cité : l’injection d’ocytocine. Cette hormone est censée faciliter l’accouchement. Mais comme tout médicament, elle comporte aussi des effets secondaires. Le Collège national des sages-femmes (CNSF) le rappelle ce 6 décembre. Pour la première fois, il émet des recommandations de pratique clinique (RCP). Le message est clair, l’ocytocine doit être utilisée de manière plus rationnelle.
Risque d’hémorragies
« Ces recommandations sont véritablement un acte fondateur pour le collège », estime sa présidente, Sophie Guillaume. De fait, le recours à l’ocytocine est largement excessif. D’après une enquête menée en 2010, deux tiers des femmes reçoivent cette hormone au cours de leur accouchement. Les indications sont pourtant restreintes sur le papier. L'hormone ne doit être administrée que dans trois situations : une contraction insuffisante de l’utérus, une chirurgie obstétricale, une atonie de l’utérus.
Mais l’ocytocine présente un avantage majeur. Elle accélère l’accouchement. C’est sans doute ce qui explique un usage aussi massif. « On médicalise beaucoup l’accouchement », tranche le Dr Camille Le Ray, gynécologue-obstétricienne au sein de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP). Il s’agit, avec ces recommandations, de trouver « un juste milieu ». Autrement dit, prescrire l’ocytocine en fonction du besoin de la patiente.
Car l’hormone n’est pas sans risque. Elle multiplie le risque d’hémorragie grave en post-partum de 1 à 5 selon les doses administrées. Des anomalies de la contractilité utérine ont aussi été observées. Elles provoquent des anomalies du rythme cardiaque du fœtus.
Respecter les indications
Ces effets secondaires, les femmes enceintes doivent en être conscientes. C’est un des objectifs de ces recommandations : informer les futures parturientes et favoriser le dialogue avec l’équipe hospitalière. Les professionnels de santé sont, bien sûr, au centre de la démarche. Les RCP sont résumées sur une fiche au format marque-page. Elles visent une optimisation du recours à l’ocytocine. La péridurale, par exemple, ne justifie pas l’utilisation de cette hormone.
Source : Collège national des sages-femmes
Le CNSF invite aussi les sages-femmes et obstétriciens à respecter le rythme naturel de l’accouchement. Des temps de latence peuvent survenir et la dilatation du col de l’utérus n’est pas linéaire. Autant de paramètres à prendre en compte avant de choisir l’ocytocine. Pour cela, les différents stades du travail doivent être connus. Ils figurent sur le marque-page de synthèse.
« L’hormone de l’amour » avec modération
L’ocytocine est une hormone naturellement produite par l’organisme lors de l’accouchement et de l’allaitement. Elle stimule les contractions au cours du travail. En 1970, une version synthétisée a été mise sur le marché dans trois indications. Des indications restreintes justifiées par un effet secondaire grave : l’administration d’ocytocine multiplie par 1,8 le risque d’hémorragie grave du post-partum. Ces saignements peuvent se produire jusqu’à 24 heures après l’accouchement. 6 % des femmes sont concernées par ce phénomène.