Plus d’un mois après les complications graves survenues chez 4 patients traités pour un lymphome au CHU de Nantes (Loire-Atlantique), et qui a causé la mort de 3 d’entre eux (entre le 10 et le 13 novembre), l’accident reste inexpliqué. « Personne ne comprend et ne sait pourquoi ces patients sont morts. Le rapport de l’Igas n’a montré aucune anomalie au niveau de la prescription, de l’indication, de la composition ou de l’administration du médicament », souligne à Pourquoidocteur le Pr Hervé Tilly, hématologue au Centre de lutte contre le cancer Henri Becquerel à Rouen (Normandie).
Aucun autre cas n’a été recensé depuis la mi-novembre. Les investigations sont toujours en cours pour comprendre comment 3 patients ont pu décéder la même semaine dans un même service. L’enquête judiciaire se poursuit elle aussi. Une situation « exceptionnelle » qui a conduit le groupe d’experts de l’Institut national du cancer (Inca), dont fait partie le Pr Tilly, et l’Agence nationale du médicament (ANSM) à recommander la suspension du protocole BEAC. Celui utilisé pour les patients de Nantes.
Cette chimiothérapie intensive à base de cyclophosphamide est pourtant prescrite depuis plus de 20 ans en France, et dans le monde. « Nous savons qu’à ces doses là, la cyclophosphamide peut avoir une toxicité pour le cœur mais pour autant, ce qui s’est passé au CHU de Nantes est totalement étonnant. De ce fait, nous avons préféré recommander l’arrêt de ce protocole, à titre de précaution », explique le spécialiste.
Le melphalan à nouveau disponible
Des préconisations suivies par la ministre de la Santé, Marisol Touraine, en raison d’un meilleur approvisionnement du melphalan. Ce traitement de référence connaissait des difficultés d’approvisionnement depuis plusieurs mois, et était réservé aux patients souffrant de myélome (un cancer de la moelle osseuse).
Un seul laboratoire en Europe produit cette molécule pour tous les pays européens et certains pays du monde. De nouvelles difficultés pourraient être à craindre. Le groupe d ‘experts de l’Inca devrait donc se réunir une nouvelle fois dans les prochaines semaines pour « déterminer la conduite à tenir si des tensions d’approvisionnement surviennent », explique le Pr Tilly.
Ainsi, tous les patients atteints d’un lymphome traités par le protocole BEAC devraient recevoir son alternative, le protocole BEAM, tant que les investigations ne permettront pas d’expliquer la cause des décès au CHU de Nantes.