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Transfusion sanguine

Des chercheurs vont produire des globules rouges universels

Par La rédaction

Grâce aux cellules souches, les chercheurs sont capables de générer des globules rouges. Une technique qui pourrait répondre aux pénuries ou aux impasses transfusionnelles. 

MEIGNEUX/SIPA
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Mettre un terme aux impasses transfusionnelles auxquelles sont confrontés certains malades polytransfusés, voire au problème de pénurie de sang, ces scénarios ne relèvent plus de la science fiction. Les chercheurs ont trouvé des substituts aux globules rouges naturels issus des dons de sang pour la transfusion. En France, l’équipe du Pr Luc Douay (Inserm et université Pierre et Marie Curie) a démontré expérimentalement qu’il était possible de fabriquer des globules rouges de culture, soit à partir de cellules souches hématopoïétiques issues de sang de cordon ombilical, soit à partir de cellules souches pluripotentes induites (iPS).

Reste à réaliser la production industrielle de ces « globules rouges de culture ». Un objectif qui pourrait être atteint d’ici trois ou quatre ans, selon le Pr Luc Douay. Cela représente une véritable prouesse technologique car il faut passer de la génération de quelques milliards de globules rouges en laboratoire à la production industrielle de culots globulaires qui ne contiennent pas moins de 2000 milliards de cellules chacun…

Chaque année dans le monde, plus de 90 millions de poches de sang sont distribuées! C’est ce qu’a rappelé le Pr Luc Douay auprès de l’association France Biotech, qui regroupe les entrepreneurs des biotechnologies. Aujourd’hui, une petite dizaine de consortiums, regroupant des industriels et des équipes académiques, se sont lancés dans cette course mondiale (aux Etats-Unis, en Corée, en Australie, au Japon, en Allemagne). Dans cette compétition, la France est en bonne place grâce aux travaux de l’équipe du Pr Luc Douay.

Ecouter le Pr Luc Douay, hématologue, directeur de recherche Inserm et chef de service à l’hôpital Saint Antoine à Paris. « Notre objectif est d’avoir conçu l’automate à production de globules rouges qui nous permettra de débuter les premiers esais cliniques chez l’homme d’ici environs quatre ans».


Deux sources sont aujourd’hui utilisables pour fabriquer des globules rouges. Au départ, les chercheurs ont pris des cellules souches du sang, les cellules souches hématopoïétiques, que l'on trouve dans le sang du cordon ombilical de tous les enfants à la naissance. « En 2005, nous avons réussi à produire des globules rouges à partir de ces cellules, raconte l’hématologue français. Et en 2011, son équipe a injecté ce type de globules rouges à l’homme. « Nous avons alors constaté que leur durée de vie est identique à celle de globules rouges transfusés. Au bout de cinq jours, le taux de survie des globules rouges de culture dans la circulation sanguine du donneur était compris entre 94 et 100 % et, au bout de 26 jours, entre 41 et 63 % ; ce taux est comparable à la demi-vie moyenne de 28 jours des globules rouges natifs normaux ». 
Ces résultats démontrent que la durée de vie et le taux de survie des cellules cultivées sont similaires à ceux des globules rouges « classiques », ce qui étaye leur validité en tant que source possible de transfusion. « Ils transportent l’oxygène et se comportent exactement comme ceux du sang, souligne le Pr Luc Douay. Toutes les investigations réalisées en laboratoire, chez l’animal, et maintenant chez l’homme, démontrent la normalité de ces globules ».

Entre temps, une deuxième source potentielle de globules rouges a été mise à jour. Ce sont les cellules souches pluripotentes induites (iPS). Cela fait suite aux travaux de l’équipe du Pr Shinya Yamanaka de l’Université de Kyoto, qui a montré en 2006 que l’on peut reprogrammer une cellule adulte, c’est-à-dire mature, pour lui faire retrouver les caractéristiques d’une cellule souche embryonnaire.
Une véritable révolution, qui a été récompensée par le prix Nobel de médecine en 2012. Depuis, l’équipe du Pr Douay se focalise sur cette technique pour produire des globules rouges. Elle est technologiquement plus complexe, car il faut dans un premier temps fabriquer ces cellules iPS. Mais après « nous avons une source illimitée qui produit toujours le même type de globules rouges », explique le Pr Douay.

Ecouter le Pr Luc Douay. « Avec trois donneurs choisis astucieusement en fonction de leurs groupes sanguins on pourra répondre dans le futur à plus de 99% des situations transfusionnelles, c’est-à-dire que nous ne sommes pas loin du concept de globules rouges universels ».
 

Si le rêve d’un sang universel semble à la portée du doigt, il ne faut pas pour autant négliger le don de sang. Pour le Pr Luc Douay, qui est aussi le directeur scientifique de l’établissement français du sang d’Ile-de-France, « on a besoin plus que jamais de donneurs car l’objectif pour le moment n’est pas de remplacer la transfusion mais plutôt de proposer une solution aux malades en situation d’impasse transfusionnelle ».
C’est le cas des patients polytransfusés qui  développent des anticorps contre les globules rouges transfusés de façon répétitive. Ce problème se retrouve chez les personnes qui ont une maladie congénitale de l’hémoglobine comme la drépanocytose qui touche plus de 300 millions d’individus dans le monde, et chez les personnes qui ont une anomalie acquise de la moelle osseuse comme les myélodysplasies ou les états pré-leucémiques.

Ecouter le Pr Luc Douay.« Nous avons toujours besoin des donneurs de sang et surtout qu’ils ne pensent pas qu’on va pouvoir se passer d’eux. »