L' essai clinique de Biotrial, qui ont provoqué la mort d'un volontaire en janvier 2015, connaît un nouvel épisode. Le Figaro a en effet révélé lundi que le Parquet de Paris avait ouvert une nouvelle enquête judiciaire sur les causes de l'AVC d'un autre volontaire qui avait participé à l'essai clinique de Rennes.
C'est le pôle de santé publique du parquet de Paris qui a ouvert en août 2016, sur ce cas d'AVC, une enquête préliminaire pour « blessures involontaires ». L'action est, il faut le souligner, totalement distincte de l'instruction menée actuellement par des juges sur les circonstances de l'essai clinique de Rennes. L’AVC de ce volontaire est même survenu deux mois avant le décès de Guillaume Molinet par lésions vasculaires atypiques avec micro-hémorragies au niveau cérébral, liées à l’administration de la molécule BIA 10-2474 du fabricant portugais Bial (testée par Biotrial). Depuis juin, rappelons que ce cas fait l'objet d'une instruction pour « homicide involontaire et blessures involontaires ».
Des conclusions contradictoires
Mais ce qui a motivé la nouvelle enquête, ce sont les images d’une IRM d'un autre volontaire, Patrick Ollive. L'homme a participé en novembre 2015 à un autre volet de cet essai thérapeutique. Celui-ci consistait à absorber des doses de 10 mg de la molécule testée (contre 50 mg pour Guillaume Molinet et les cinq autres volontaires de son groupe, tous victimes de troubles neurologiques).
En mai 2016, la journaliste Anne Jouan publiait les images de son IRM. Elles mettaient en évidence un AVC qualifié d’ancien par le CHU de Rennes, et donc apparemment non lié aux essais cliniques de l’époque. Cette dernière poursuivait en indiquant que Patrick Ollive avait fait état d’un accident de vélo de jeunesse qui aurait aussi pu expliquer la trace d’AVC, « même s'il pensait que son AVC était lié à la prise du médicament test », précise-t-elle.
En guise de défense, le président du laboratoire Biotrial, Jean-Marc Gandon, a déclaré à l’Agence France Presse (AFP) : « Quelles que soient les circulaires ministérielles, quelles que soient les IRM ou les autres examens biologiques, nous n'aurions pu détecter cette anomalie endocrânienne ».
Des investigations en cours à la police rennaise
Anticipant cette réponse, Le Figaro a demandé à deux radiologues, un biophysicien et un professeur de neurologie de relire cette IRM. L’un deux, le Pr Alain Privat, neurobiologiste et membre de l’Académie de médecine, indique qu'à ses yeux l’AVC sur l’image n’était pas ancien mais bien récent, et qu’il datait de l’époque où Patrick Ollive participait aux tests chez Biotrial.
Cette interprétation différente du cliché, qui établit donc un lien avec l’essai clinique, avait étonnamment été suivie, le 23 mai, d’un deuxième compte-rendu du CHU de Rennes, qui cette fois remplaçait l’adjectif « ancien » par l’adjectif « récent ». Autrement dit, le CHU de Rennes lui aussi laissait ouverte la porte à un lien entre la prise de la molécule et l’AVC d’un patient volontaire.
C’est ce revirement ou cette contradiction dans les deux avis du CHU de Rennes qui a motivé, selon Le Figaro, le parquet de Paris à ouvrir cette seconde enquête, restreinte à l’AVC de Patrick Ollive. Les investigations ont été confiées à la direction interrégionale de la police judiciaire de Rennes.