Améliorer le dépistage du cancer du col de l’utérus, c’était un des principaux objectifs du plan Cancer 2014-2019. Il devrait être atteint en 2018. Le frottis cervico-utérin sera en effet organisé à l’échelle nationale. Santé Publique France et l’Institut national du cancer (INCa) l’annoncent dans un Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire (BEH) thématique.
Publié à l’occasion de la Semaine européenne de prévention dédiée à ce cancer, il détaille l’impact positif d’une telle stratégie dans la détection de cette maladie. Car 40 % des femmes n’ont pas réalisé de frottis cervico-utérin dans les 3 ans, contrairement aux recommandations.
Des zones défavorisées
Le choix du dépistage organisé s’appuie sur l’expérimentation de la stratégie menée dans 13 départements français. Réalisé pendant trois ans, ce test avait un objectif principal : déterminer l’intérêt d’inviter, par courrier, les femmes à réaliser un frottis de détection. Le modèle s’appuie sur celui utilisé dans le cancer du sein. Plus d’un million de Françaises ont reçu ce document car elles n’avaient pas réalisé cet examen dans les 3 ans. Dans les 9 à 12 mois suivant cette vague d’envois, un second courrier de relance a été adressé à 455 500 d’entre elles.
La méthode est efficace, au vu des résultats. Au cours du suivi, 62 % de frottis ont été notifiés. 11 % étaient liés au courrier d’invitation. Les autres ont été opérés dans le cadre d’une pratique individuelle. Cela représente, dans l’ensemble, une amélioration de 12 points de pourcentage. Mais dans le détail, certains départements sont clairement défavorisés. Dans le Cher, zone à faible densité médicale, à peine un quart des femmes se sont fait dépister.
Une conclusion en demi-teinte qui n’empêche pas les auteurs de l’article de se montrer optimistes. « Ce gain est vraisemblablement sous-estimé car certaines structures de gestion ont arrêté les invitations/relances au 31 décembre 2012 et que les femmes relancées en Alsace n’ont pu être prises en compte », indiquent-ils. A noter, tout de même, que l’objectif des 80 % de couverture, fixé par le Plan cancer, n’est pas atteint.
Des populations isolées
Cette étude ne se contente pas d’analyser l’intérêt d’un dépistage organisé. Elle confirme aussi l’impact du frottis sur la détection des anomalies. Durant les trois ans d’expérimentation, plus de 5 000 lésions précancéreuses de haut grade, 5 carcinomes glandulaires in situ et 323 cancers invasifs ont été repérés. De fait, l’analyse médico-économique montre que l’incidence et la mortalité par cancer du col de l’utérus sont réduites de 13 % et 26 %, respectivement.
Le frottis est efficace, c’est pourquoi il est nécessaire d’élargir son accès. Car toutes les femmes ne sont pas égales face à cet examen. Après 50 ans, en présence d’une invalidité, d’une affection de longue durée ou d’une dépendance à l’alcool ou aux opioïdes, le recours à cette stratégie de prévention reste faible. Trop faible.
Certaines populations sont encore plus défavorisées. C’est le cas des femmes obèses, souffrant d’un retard mental ou d’une maladie alcoolique du foie. Elles sont moins de 30 % à réaliser un frottis de dépistage dans l’intervalle recommandé. A l’inverse, les femmes atteintes de cancer de la peau ou de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) sont plus de 70 % à participer au dépistage.
L'auto-prélèvement en complément
L’absence de participation n’est pas pour autant synonyme d’isolement médical. La plupart des femmes non dépistées consultent régulièrement un médecin généraliste. Mais 80 % d’entre elles ne voient pas suffisamment leur gynécologue.
A terme, le test de dépistage des papillomavirus pourra être instauré en complément. Cet examen détecte jusqu’à 26 % des lésions précancéreuses et réduit l’incidence du cancer dans une proportion comparable au frottis. Les auteurs de l’article proposent donc une alternative au dépistage organisé : plutôt que d’envoyer une lettre de relance, des kits d’auto-prélèvement pourraient être adressés aux non-participantes.
Un essai randomisé, réalisé en Indre-et-Loire, confirme l’efficacité d’une telle approche. 22,5 % des femmes qui ont reçu le kit l’utilisent alors que 11 % de celles qui reçoivent une invitation de relance en tirent profit. Soit deux fois moins.
« L’envoi à domicile d’un kit d’APV est plus efficace et coût-efficace qu’une lettre de relance pour augmenter la participation au dépistage du CCU parmi des femmes non-dépistées », concluent les auteurs. Si ce test est adopté, il devrait être réalisé tous les 5 ans. Une solution envisageable, selon l’INCa, mais une fois que le dépistage organisé sera mis en place sur tout le territoire.
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