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Pesticides, nitrates, plomb...

Polluants : 2,8 millions de Français boivent de l'eau contaminée

Par la rédaction

Plus de 9 consommateurs sur 10 ont accès à une eau potable qui respecte les réglementations, près de trois millions de Français restent exposés à des polluants.

Gertje/pix5

En France, l’eau potable est globalement de qualité mais des millions de citoyens restent exposés à des polluants présents dans cette denrée vitale. Tel est l’enseignement que l’on peut tirer d’après la nouvelle carte interactive sur la qualité de l’eau potable en France établie par l’UFC-Que Choisir.

Celle-ci montre que si près de 96 % des consommateurs peuvent boire leur eau en toute confiance, près de trois millions de Français ont en revanche une eau polluée notamment par les pesticides, les nitrates ou le plomb.

Agriculture : premier pollueur

« Ce constat globalement positif, s’agissant de l’eau distribuée, ne saurait masquer la triste réalité de ressources en eau massivement polluées nécessitant de coûteuses campagnes de dépollution. Si la consommation de l’eau du robinet doit être encouragée, les pouvoirs publics doivent urgemment renforcer la politique de l’eau », expliquent les auteurs dans un communiqué de l’association.

Sur la base des résultats officiels du Ministère de la Santé, l’UFC-Que Choisir a passé au peigne fin les réseaux de distribution des 36 600 communes de France, pour la totalité des 50 critères réglementaires. Le résultat global se révèle très satisfaisant, puisque l’eau distribuée à 95,6 % des consommateurs français « respecte haut la main la totalité des limites réglementaires et ce tout au long de l’année ».

En revanche, pour les 4,4 % qui boivent une eau polluée, soit 2,8 millions de Français, le tableau est moins optimiste. L’agriculture reste la première cause de pollution de l’eau avec, en tête, les pesticides qui constituent « de loin la première cause de non-conformité » (5 % des réseaux de distribution dans 2271 communes).

Ces pesticides contaminent l’eau desservie à près de deux millions de consommateurs principalement ruraux, dans les régions d’agriculture intensive. « Mais ils affectent également les réseaux de certaines villes », explique l’association, qui cite Tremblay en France (2 des 3 réseaux de distribution), Sens (3 des 4 réseaux de distribution), Lens, Tarbes, Auch …

Installations vétustes

Parmi les polluants, viennent ensuite les nitrates (0,8 % des réseaux contaminés dans 370 communes) qui polluent l’eau de près de 200 000 consommateurs, notamment dans le Loiret, la Seine et Marne, l’Yonne, l’Aube, la Marne, le Pas de Calais et la Somme.

Les contaminations bactériennes dues aux défauts de surveillance ou à la vétusté des installations, constituent la 3e pollution la plus fréquente (0,7 % des réseaux dans 253 communes) et concernent environ 200 000 consommateurs.

« Si aucune ville n’est touchée, ces contaminations sont en revanche plus particulièrement rencontrées dans les petites communes rurales de montagne : Pyrénées, Massif Central et Alpes », peut-on encore lire.

Enfin, sur l’ensemble de la France, 3 % des analyses réalisées dans les logements font apparaître la présence de plomb, de cuivre, de nickel ou de chlorure de vinyle, relargués par des canalisations vétustes ou corrodées. Dans le cas du plomb, ces logements sont plus particulièrement situés dans les centres anciens : Nice, Toulon, Dijon, Avignon, Créteil, La Rochelle, Albi, St Brieuc … « Mais ces pollutions restent les plus mal mesurées car du fait d’un très faible nombre de prélèvements (15 en moyenne par ville pour les communes citées, sur la période de deux ans et demi), ces analyses isolées ne permettent pas de connaître l’exposition réelle des consommateurs ».

Trompe l'oeil

L’association alerte par ailleurs sur les apparences de conformité réglementaire de l’eau. Ainsi, concernant les canalisations, « si beaucoup de réseaux de distribution échappent à la sanction d’une non-conformité en plomb ou en chlorure de vinyle, c’est souvent à la faveur d’analyses en trop faible nombre, voire inexistantes ».

Par ailleurs, si 97 % de l’eau est exempte de pesticides, « ce n’est pas parce que l’agriculture aurait amendé ses pratiques, mais parce que l’eau subit de coûteux traitements de dépollution. Or 87 % de cette dépollution est financée par les consommateurs contre seulement 6% par les agriculteurs, en application de l’inadmissible principe du "pollué-payeur" ! », dénonce l’association.

"Audit"

Afin d’encourager les Français à privilégier l’eau du robinet à l’eau en bouteilles, l’UFC Que-Choisir demande une « réforme en profondeur de la politique agricole de l’eau, par une véritable mise en œuvre du principe ‘pollueur – payeur’ dans le calcul des redevances de l’eau, au moyen d’une augmentation de la taxation des pesticides et des engrais azotés et par un soutien financier aux agricultures biologiques et intégrées ».

L’association demande également un audit national des composants toxiques des canalisations afin d’estimer le niveau d’exposition des consommateurs et, dans le cas du plomb, une aide aux particuliers pour le remplacement de leurs canalisations.