Chaque année, le mélanome tue 1 500 personnes en France. Depuis cinq décennies, le nombre de diagnostics progresse de 10 % par an. Partout dans le monde, la tendance est à la hausse. Un horizon plus clair s’esquisse, d’après une équipe de l'International Prevention Research Institute (IPRI). D’ici 2050, le taux de mortalité lié au mélanome malin aura reculé. C’est le résultat de la modélisation présentée au Congrès européen sur le cancer (ECC) qui se tient à Amsterdam (Pays-Bas) du 27 au 30 janvier.
Les calculs réalisés par les experts en cancérologie livrent un premier bilan : la population la plus à risque de mélanome est née entre 1900 et 1960. A cette époque, les risques d’une exposition excessive aux UV n’étaient pas connus et les professionnels de santé conseillaient à certains patients de se mettre au soleil. Une période de joyeuse ignorance qui a pris fin dans les années 1960.
Des pics atteints récemment
« Le nombre de morts actuel est le résultat de plusieurs facteurs, confirme le Pr Alexander Eggermont, directeur général de Gustave-Roussy (Villejuif, Val-de-Marne) interviewé par Pourquoidocteur. Parmi eux, les vacances destinées à bronzer qui sont particulièrement néfastes pour les Scandinaves, les Ecossais ou encore les Irlandais. Quand on habite à Nice, on déjeune à l’ombre, pas sur la plage. » Le vieillissement de la population est un autre facteur qui explique la progression des mélanomes.
L’estimation livrée par le CIRC s’appuie sur les données de trois pays aux expositions différentes : les Etats-Unis, la Suède et l’Australie. Chacun atteint un pic à une période différente. La Suède est le pays où la prise de conscience est la plus tardive. Ce n’est qu’en 2010 que la mortalité atteint son sommet. En Australie, les hommes connaissent un pic en 2015, les femmes en 1990. Le recul devrait donc s'amorcer prochainement.
« Nos résultats montrent clairement que la mortalité due au mélanome a été provoquée par une exposition à des rayons UV très cancérigènes avec le soutien de la communauté médicale entre 1900 et 1960 », estime Alice Koechlin, qui présente ces travaux. Pendant de nombreuses années, il était recommandé d'exposer les enfants au soleil, surtout dans les pays du Nord, notamment pour contre-carrer le manque de vitamine D et réduire les risques de rachitisme.
La question du coût
La prévention a également payé, au vu de la modélisation. Elle projette deux scénarios. Au cœur de l’hypothèse des chercheurs, l’impact des traitements innovants sur la survie. Dans la première projection, l’accès à ces nouvelles thérapies n’est pas universel. Résultat : en 2050, le taux de mortalité recule. En Australie, il est divisé par deux. Aux Etats-Unis, il est deux et demi à trois fois moins élevé. L’effet est moins marqué en Suède, où le taux chute à un seuil une fois et demi plus faible qu’au moment du pic.
Mais sans accès équitable aux traitements innovants, le nombre de décès continuera d’augmenter. En cause, le vieillissement de la population. En effet, les mélanomes devraient survenir après 70 ans à compter de cette date. Le mérite revient à la prévention. Réduire le nombre de morts demandera un effort supplémentaire. « Si ces traitements sont disponibles, la mortalité par mélanome va baisser plus vite et les courbes se redresseront dès 2020-2025 », projette le Pr Eggermont. Une diminution qui pourrait être de l'ordre de 25 %.
Reste la question du coût de ces médicaments, qui se chiffre en milliers d’euros. Car à l’heure actuelle, une prise en charge universelle ne peut tout simplement pas être supportée par la collectivité.