Chaque année, les suicides sont responsables de plus de 10 000 décès en France, et 800 000 dans le monde, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS). C’est un décès toutes les 40 secondes. Pour la 21e journée nationale de prévention du suicide, ce jeudi, SOS Amitié, la plateforme d’écoute et partenaire de cette journée d’action, encourage à la mobilisation des politiques, des personnels médicaux, sociaux, des collectivités, mais aussi des particuliers, pour soutenir les personnes en souffrance psychique.
La plateforme d’écoute mise en place par l'association repose sur 1 600 bénévoles. Ils , reçoivent 700 000 appels par an. Des appels de plus en plus nombreux (+ 13 % en un an), et qui durent plus longtemps (+ 11 %).
Seuls 2,4 % d’entre eux évoquent explicitement l’idée du suicide, mais tous les appels traduisant une souffrance doivent être traités. « Nous acceptons tous les types d’appel, même ceux qui ne parlent pas de suicide, car nous estimons que c’est important de faire de la prévention le plus en amont possible », explique à Pourquoidocteur Jean-Pierre Igot, président de SOS Amitié.
« À l’écoute de la France qui va mal »
« Les personnes qui appellent savent qu’elles vont tomber sur des bénévoles. Ce ne sont pas des professionnels de santé, mais plutôt des amis, qui vont les écouter, poursuit-il. Elles évoquent toute forme de mal-être, ce qui ne va pas chez elles. »
Les appels émanent de personnes victimes de souffrances psychiques, liées au travail, à la vie familiale, au quotidien… L’ouverture d’esprit sur les maladies mentales a aussi délié les langues, et permet un dialogue plus facile sur les soucis psychologiques. « Nous sommes à l’écoute de la France qui va mal », résume M. Igot
La solitude, premier critère d’appel
« Parmi les appels que nous recevons, 85 % proviennent de personnes âgées de 25 à 65 ans », ajoute Jean-Pierre Igot. Mais le suicide est aussi la deuxième cause de mortalité chez les 15-24 ans, et la première chez les 25-34 ans.
« On se rend vite compte que les jeunes ne sont pas toujours au courant de tout ce que la société propose pour les aider. Nous sommes aussi là pour les réorienter vers l’assistance sociale, l’infirmerie du lycée, le planning familial… Chaque écoutant a une liste d’organismes bien connus vers lesquels ils peuvent orienter les appelants, voire même leur donner les coordonnées. »
Les personnes âgées sont elles aussi concernées. Les problèmes de santé les inquiètent, surtout lorsque les pronostics sont sévères. Mais c’est la solitude, pour elles comme pour les autres, qui est le premier facteur d’appel. Et des personnes très entourées par une famille peuvent aussi bien se sentir seules, malgré la présence de conjoints et d’enfants.
Communiquer et prendre soin
Pour faire face aux appels de détresse, les bénévoles sont recrutés par rapport à leur capacité d’écoute. L’important, c’est de parvenir à faire parler les appelants. « Nous ne donnons pas de conseils, nous ne sommes pas directifs, précise Jean-Pierre Igot. Nous formons nos écoutants à ce que j’appelle pompeusement la reformulation, qui consiste à reprendre les propos de l’appelant avec les mots de l’écoutant. Parfois, cela déclenche quelque chose chez eux. »
« Il faut en parler, pour qu’il y ait une prise de conscience générale, ajoute-t-il. On ne se rend pas compte de la quantité de gens qui vont mal, qui sont dans de réelles difficultés. C’est pour cela que nous sensibilisons, que organisons cette journée, que nous communiquons dans les médias. Le mot d’ordre est "communiquer et prendre soin" ».
En 2013, Marisol Touraine a créé, au sein de Santé publique France, l’Observatoire national du suicide. Il rassemble les organismes de l’état concernés. SOS Amitié y siège au côté de représentants des services d’urgence et de personnels soignants. Chaque année, un rapport est publié dans lequel des recommandations figurent pour améliorer la prévention et la prise en charge du suicide.