Difficile aujourd’hui de nier le lien entre pollution et santé en particulier respiratoire des enfants. Et les chiffres sont accablants : troisième cause de mortalité derrière le tabac et l’alcool, deux années d’espérance de vie en moins, 48 000 décès prématurés chaque année. La pollution de l’air serait bien en passe de devenir le tueur numéro un. Face à ce phénomène de société qui est modifiable et urgent de modifier, les plus fragiles sont les jeunes enfants à qui la pollution coupe le souffle, selon le Pr Jocelyne JUST, chef du service de pneumo-allergologie pédiatrique à l’hôpital Trousseau à Paris.
Asthmes graves
Depuis des dizaines d’années, de très nombreuses études épidémiologiques vont dans le même sens : en période de pics de pollution atmosphérique, se produit une augmentation des exacerbations sévères d’asthme conduisant aux urgences et aux hospitalisations. Mais ce n’est pas tout. En dehors des pics, une simple augmentation des taux de polluants augmente le risque d’être hospitalisé : une étude où des enfants asthmatiques avaient été équipés de capteurs, a montré qu’un seul accroissement de la pollution de fond était associé à une augmentation de la consommation de médicaments contre l’asthme, mais aussi à plus de consultations chez son médecin, ou aux urgences.
De façon plus globale, force est de constater que les médecins voient de plus en plus d’asthmes graves chez des enfants, difficiles à traiter, alors que l’arsenal thérapeutique est de plus en plus performant en particulier avec l’avènement des biothérapies.
Plus l’enfant est jeune, plus il est sensible
C’est entre 1 et 2 ans que la pollution est la plus néfaste pour l’enfant. En effet il respire plus vite qu’un adulte, donc il inhale plus de polluants ; sa surface corporelle est aussi plus petite, donc il va en concentrer plus ; enfin son organisme est immature et se défend mal.
La pollution agit aussi très tôt quand l’enfant est encore dans le ventre de sa mère : des études ont montré que les mamans exposées avaient plus de risque d’avoir un enfant asthmatique. En cause des modifications épigénétiques, c’est à dire par des modifications de l’expression de gènes au niveau des cellules du cordon ombilical.
La pollution agit aussi sur les pollens en les modifiant et les rendant plus allergisants et inflammatoires. C’est pourquoi des allergies respiratoires, mais aussi alimentaires risquent de se développer parallèlement à l’asthme.
PM 2,5 indestructibles
Ce sont les particules ultra-fines essentiellement issues de la circulation automobile qui sont responsables de l’apparition de ces nouveaux cas d’asthme ou de leur aggravation. Les PM 2,5 agissent en allant très profond dans l’appareil respiratoire. Chez des nourrissons asthmatiques parisiens, l’analyse de cellules pulmonaires a mis en évidence la présence de ces particules au sein même des cellules. Elles ne peuvent pas êtres détruites car d’origine chimique et persisteront donc à cet endroit. Mais elles risquent aussi de passer dans les vaisseaux sanguins où elles créent une inflammation qui peut aggraver les maladies cardiovasculaires de l’adulte.
Pour Jocelyne Just, il est donc urgent d’agir. Limiter la circulation automobile dans les agglomérations tant au diesel, source de PM fines et ultra-fines, qu’à l’essence qui produit de l’ozone, est une excellent mesure, n’en déplaise à certains !
Retrouvez l'intégralité de l'interview du Pr Jocelyne Just dans l'émission La Médecine au Féminin :