Il a fallu la publication d'une circulaire le 30 janvier ayant pour but de faciliter la délivrance d’un certificat de nationalité française aux enfants nés à l’étranger via la gestation pour autrui (GPA) pour que le calendrier du gouvernement soit complétement chamboulé. Christine Taubira n'y est pas étrangère.
En plein débat sur le projet loi sur le mariage gay, le Garde des Sceaux a donné du "grain à moudre" à l'opposition. Ses ténors ont retrouvé de la voix affirmant que la GPA serait introduite dans le projet de loi sur la famille qui sera discuté le 27 mars. Il était prévu que la procréation médicalement assistée, notamment pour les couples d'homosexuelles, figure dans ce texte. Dernier rebondissement ce week-end après une cacophonie gouvernementale, le volet PMA devrait attendre que le comité national d'éthique (CCNE) se prononce sur cette question vraisemblablement en septembre prochain. Et le président du CCNE, le Pr Jean-Claude Ameisen, n'a pas caché dans le Monde daté du 2 févier que la gestation pour autrui fera partie des réflexions des membres du CCNE.
En avril 2010, le CCNE, saisi sur la question, avait statué clairement en se prononçant contre. La GPA est interdite en France.
Parmi les arguments qui avaient fait pencher la balance en faveur du non, il y avait notamment le fait que dans les pays où la GPA est autorisée (Belgique, Danemark, Pays-Bas...), les femmes qui portaient les enfants le faisaient majoritairement pour des raisons d’argent.
Ecoutez Pierre Le Coz (1) , professeur de philosophie, membre du groupe de travail de l’avis rendu par le CCNE : « Le CCNE s’est fait son opinion sur l’argument économique : la motivation lucrative est prédominante chez les femmes qui se proposent pour la GPA ».
Le Dr Joëlle Belaïsch-Allart, gynécologue et également membre du groupe du travail du CCNE qui s’était penché sur la question, ajoute qu’ils avaient « peur du risque de marchandisation du corps humain, du non-respect de la femme porteuse ». L’avis était limpide, « issu d’une réflexion riche et collégiale ».
Dans l’avis du CCNE, la question que le couple concerné par la GPA soit hétérosexuel ou homosexuel n’intervenait pas. La GPA était uniquement discutée pour les couples pour lesquels les femmes étaient atteintes « de formes irrémédiables et non curables d’infertilité ». Les couples homosexuels, demandeurs d’une GPA pour des raisons autres, sont donc exclus de la question. « Le CCNE a toujours été réservé à l’égard des usages de convenance. Le comité veut vraiment que les médecins fassent de la médecine et qu’il y ait de la pathologie ou du handicap pour intervenir », rappelle Pierre Le Coz. Le Pr Jean-Claude Ameisen confirme : « La médecine doit-elle se limiter à prévenir ou à traiter des maladies ou devrait-elle répndre à des demandes sociétales ? »
Bien que l’avis du CCNE fut parfaitement exprimé, sept membres du groupe de travail s’étaient prononcés pour la GPA dans des cas très particuliers, s’agissant des femmes ayant des ovaires mais pas d’utérus (de fait d’une maladie ou de l’ablation de l’utérus pour raison médicale). « Il nous semblait profondément injuste de ne pas pouvoir offrir à ces femmes une GPA. Le nombre de cas en causes était extrêmement faible, nous aurions pu avoir un comité pour s’assurer qu’il n’avait pas de relation mercantile, etc. Nous pensions possible que la loi encadre cela », détaille le Dr Belaïsch-Allart.
Toutefois, la médecine apporte déjà certaines réponses à des problèmes qui ne sont pas exclusivement médicaux, comme le souligne Joëlle Belaïsch-Allart.
Ecoutez le Dr Joëlle Belaïsch-Allart, chef du service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction au centre hospitalier de Sèvres : « Dans le cas de la PMA, les infertilités sociétales sont d’ores et déjà prises en compte ».
Des « rebelles » pour une GPA dans certaines conditions
Bien que l’avis du CCNE fut parfaitement exprimé, sept membres du groupe de travail s’étaient prononcés pour la GPA dans des cas très particuliers, s’agissant des femmes ayant des ovaires mais pas d’utérus (de fait d’une maladie ou de l’ablation de l’utérus pour raison médicale). « Il nous semblait profondément injuste de ne pas pouvoir offrir à ces femmes une GPA. Le nombre de cas en causes était extrêmement faible, nous aurions pu avoir un comité pour s’assurer qu’il n’avait pas de relation mercantile, etc. Nous pensions possible que la loi encadre cela », détaille le Dr Belaïsch-Allart.
Par ailleurs, en ce qui concerne d’éventuelles exceptions, l’avis avait noté que « l’admission d’exceptions, à quelque niveau que l’on place le curseur, maintiendrait dans l’illégalité les couples qui ne sont pas dans son champ, soit parce qu’ils sont composés de personnes de même sexe, soit parce que la femme n’est pas atteinte des pathologies dont la société a décidé qu’elles justifient leur prise en charge par une GPA ».
(1) Président du comité de déontologie et de prévention des conflits d'intérêts de l'Anses.