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Rapport taille/hanches

Diabète de type 2 : la génétique confirme le rôle de la graisse abdominale

Par le Dr Jean-Paul Marre avec Anne-Laure Lebrun

Grâce à une approche génétique, des chercheurs américains confirment le lien entre graisse abdominale et risque accru de diabète et de maladies coronaires. 

sunabesyou/epictura

Les personnes atteintes d’obésité abdominale ont un risque accru de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires. Une analyse génétique, appelée randomisation mendélienne (voir encadré), a permis de mieux évaluer le lien entre cette graisse abdominale et maladies cardiométaboliques. Ces travaux, menés sur quatre grandes cohortes et les données de la UK Biobank, sont  publiés dans le JAMA.

Cette association entre graisse abdominale et maladies métaboliques et cardiovasculaires est connue depuis longtemps. De nombreux travaux ont montré qu'un rapport tour de taille/tour de hanches élevé était étroitement liée à la morbidité et mortalité de ces maladies, bien plus que la corpulence estimée par le calcul de l’indice de masse corporelle (IMC).

Avec ses collègues du Massachusetts General Hospital (Etats-Unis), le Dr Sekar Kathiresan a examiné l’ADN de plus de 320 000 patients ayant participé à des études entre 2007 et 2015, et le génome de 112 000 personnes collecté par la BiobanK de Grande-Bretagne. En parallèle de ces analyses génétiques, ils ont évalué le profil lipidique et glycémique des participants, ainsi que la pression artérielle et les taux d’insuline.


Un biomarqueur plus précis

Les scientifiques ont établi un score de risque génétique d'avoir un rapport tour de taille/tour de hanches élevé. Ce score inclut 48 variants génétiques. L'analyse menée par les chercheurs américains montre que chaque augmentation génétiquement déterminée de 1 écart-type (SD) du rapport tour de taille/tour de hanches est associée à une augmentation significative de 1,7 fois du risque de diabète de type 2. Le risque de maladie coronarienne est lui augmenté entre 1,4 et 1,6 fois, selon les cohortes étudiées.

« Ces résultats suggèrent que la distribution de la graisse dans le corps permet d’expliquer en partie les variations de risques de diabète de type 2 et de maladies coronaires observés parmi les individus, bien plus que l’IMC » écrivent les auteurs, ajoutant que la mesure du tour de taille se présente comme « un biomarqueur utile pour le développement de thérapie préventive ».

En France, la prévalence de l’obésité abdominale est plus élevée que celle de l’obésité. Plus de 40 % des hommes et 48 % des femmes ont un tour de taille trop élevé, contre 15,8 % d’hommes et 15,6 % de femmes obèses, selon une étude réalisée auprès de la cohorte Constances.

 

Retrouvez l'entretien avec le Pr Lyse Bordier, auteur de Le Diabète, tout ce qu'il faut savoir (Ed. Solar) :

Les apports de la randomisation mendélienne

La randomisation mendélienne consiste à randomiser les malades en fonction de leur risque génétique pour une anomalie définie, généralement un facteur de risque. Dans le cas présent, c’est le risque d’avoir un rapport tour de taille/tour de hanches élevé qui a permis de comparer les malades à risque génétique d’avoir un rapport tour de taille/tour de hanches élevé par rapport à ceux qui ont un risque génétique faible.

Ces résultats suggèrent que la distribution de graisse corporelle, au-delà de la simple mesure de l'IMC, pourrait expliquer une partie du risque augmenté de diabète de type 2 et de coronaropathie, à la fois chez les personnes et à l’échelle des populations.

La randomisation mendélienne commence lentement à générer des données intéressantes pour la clinique et la santé publique et son utilisation devrait être vivement encouragée avant de s'engager dans des essais cliniques de grande taille : c’est pour n’avoir pas su faire la différence entre facteur de risque et indicateur de risque que les grands essais sur l’augmentation du HDL-cholestérol ont été un échec retentissant.

Par ailleurs, en termes de santé publique, il est avéré qu’il est difficile de réduire l'obésité par les différentes interventions actuellement disponible, et il en va de même pour l’obésité abdominale. Dans ces conditions, les études de prévention primaire devraient mettre l’accent sur les interventions vis-à-vis des facteurs de risque qui sont réellement contrôlables, comme la pression artérielle et le taux de cholestérol, et la randomisation mendélienne permettrait d’identifier quelles personnes cibler et avec quel traitement préventif pour en tirer le plus grand bénéfice possible.