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Etats-Unis

Légalisation du cannabis : l'alerte des pédiatres pour les ados

Par Marion Guérin

Alors que les Etats-Unis légalisent l’usage de cannabis, les pédiatres américains émettent des recommandations pour protéger les plus jeunes.

Kesu01/epictura

La légalisation, oui, mais pas à n’importe quel prix. Alors que de plus en plus d’Etats américains décident de réguler le marché du cannabis, les pédiatres du pays prennent la parole pour alerter la population sur les risques de cette substance pour les enfants et les adolescents, et administrer des conseils visant à limiter leur exposition.

Les effets, bien connus, du cannabis sur cette jeune population sont rappelés dans un rapport de l’Académie Américaine de Pédiatrie publié dans la revue Pediatrics. « La marijuana n’est pas une drogue bénigne pour les adolescents, écrivent les auteurs de ces travaux. Leur cerveau est encore en développement et le cannabis peut générer des troubles du développement cérébral ». Les chercheurs soulignent ainsi que chez les plus jeunes, une consommation régulière peut conduire à des « troubles sérieux de la santé mentale – addiction, dépression, psychose… ».

Ne pas fumer devant les ado

Le rapport vise ainsi à lutter contre la banalisation de ce produit, légalisé dans un but récréatif ou thérapeutique (ou les deux) dans 29 Etats. D’autant plus que les dosages en THC (tetrahydrocannabinol, substance active de la marijuana) sont « plus élevés qu’il y a 20 ans », augmentant ainsi les risques pour la santé des plus jeunes.

Les spécialistes américains émettent donc des recommandations, semblables à celles que l’on pourrait retrouver pour l’alcool, afin de limiter les usages et mésusages chez ces adolescents vulnérables.

D’abord, l’AAP conseille aux parents de ne pas fumer d’herbe devant leurs enfants. « Les parents qui consomment eux-mêmes de la marijuana peuvent ne pas être complètement conscients des effets que cela induit sur leurs enfants (…). Le fait de voir ses parents fumer du cannabis augmente la probabilité pour les enfants d’en consommer, quelque soit le discours tenu par les parents sur ce produit. En effet, les actes ont plus de portée que les mots… »

Ne pas normaliser

On retrouve ces recommandations pour l’alcool. En effet, des études ont montré que dès l’âge de trois ans, les enfants parvenaient à identifier les boissons alcooliques parmi les autres et comprenaient l’effet recherché à travers elles. En cause : l’omniprésence de l’alcool dans leur environnement, qui très vite, s’établit en tant que norme. Les chercheurs appelaient alors les parents à boire le moins possible en présence de leurs enfants pour ne pas banaliser ce produit.

La situation est la même pour le cannabis. Les médecins craignent que les consommations ne s’encrent dans la société, à tel point que les usagers en perdent de vue les risques. L’AAP recommande ainsi aux parents de parler avec leurs adolescents du cannabis, de ses risques, des situations dans lesquelles il se révèle particulièrement dangereux (au volant, notamment), des raisons pour lesquelles on se met à fumer, un peu ou beaucoup.

Pour éviter des ingestions accidentelles par des enfants, les praticiens rappellent la nécessité de placer le cannabis et les produits dérivés hors de la vue des enfants.

Prudence française

Comment trouver le régime pénal adapté (dépénalisation, légalisation…) sans augmenter l’usage chez les jeunes mais au contraire, en renforçant leur niveau de protection ? En France, on retrouve cette préoccupation au sein des instances dirigeantes. Si l’inadéquation de la loi de 1970 qui pénalise l’usage de drogues ne fait plus vraiment débat, le futur modèle est loin d’être arrêté. Pendant ses cinq ans de présidence sous François Hollande, la Mildeca, qui coordonne les politiques de drogues en France, est ainsi restée sur ses gardes, malgré les demandes d’une partie de la société désireuse d’organiser le marché du cannabis.

« Mon avis, après ce mandat, c’est que personne ne sait quel est le régime pénal adapté, celui qui permettra d’éviter l’entrée en consommation des plus jeunes », souligne la présidente sortante de cette instance (1) , Danièle Jourdain Menninger. L’OFDT (Observatoire des Drogues et des Toxicomanies) et l’INHESJ doivent publier d’ici peu une analyse des différentes législations adoptées à travers le monde (Etats du Colorado et de Washington, Uruguay, Suède, Espagne, Pays-Bas) nommée Cannalex. L’objectif est d’analyser l’impact de ces législations sur les comportements pour, éventuellement, choisir le modèle le plus adapté à la France. La question de l’usage des plus jeunes restera prioritaire.

(1) Retrouvez mardi 28 février l’intégralité de l’entretien avec Danièle Jourdain Menninger, qui dresse un bilan de ses cinq années passées à la tête de la Mildeca.