La crise cardiaque fait de moins en moins de victimes. En France, la mortalité a chuté de 68 % ces 15 dernières années. Mais parmi les 18 000 morts par an, des dizaines pour être évitées grâce à une meilleure détection des signes avant-coureurs de l’infarctus, suggère une étude britannique publiée dans The Lancet Public Health.
Des chercheurs de l’Imperial College London rapportent en effet qu’en Angleterre, un patient décédé d’un infarctus sur 6 a été hospitalisé dans le mois précédant sans que les médecins ne diagnostiquent la crise cardiaque.
Pour parvenir à ces résultats, les scientifiques britanniques ont épluché les dossiers médicaux de plus de 440 000 patients hospitalisés entre 2006 et 2010 pour une crise cardiaque, ainsi que ceux de 135 000 personnes décédées d’un infarctus. Parmi ces morts, la moitié avait été hospitalisée dans les 28 jours précèdent l’accident.
Des symptômes atypiques
L’analyse approfondie de l’historique des malades révèle que pour un tiers de ces patients hospitalisés et décédés d’un infarctus, le diagnostic n’avait jamais été posé. Une grande majorité d’entre eux avait été admis à l’hôpital pour d’autres pathologies cardiovasculaires comme l’insuffisance cardiaque ou la fibrillation atriale. Ils étaient autant à présenter des symptômes atypiques de l’infarctus comme les syncopes, le souffle cours ou des palpitations.
Les auteurs soulignent que ces signes apparus un mois avant l’infarctus mortel chez ces patients auraient pu mettre les médecins sur la piste. Si ces derniers sont passés à côté, c’est peut-être parce que les examens n’ont montré aucune anomalie cardiaque, supposent les chercheurs.
« Les médecins sont très bons pour traiter les crises cardiaques lorsqu’elles sont la cause principale de l’hospitalisation, mais nous ne sommes pas très bons quand il s’agit de prendre en charge un infarctus secondaire ou reconnaître des signes subtiles qui prédisent un risque de mourir d’une crise cardiaque dans un futur proche », confie le Dr Perviz Asaria, chercheur à l’Ecole de santé publique de l’Imperial College London et responsable des travaux.
Sensibiliser le grand public
Causé par l’obstruction d’une artère irrigant le cœur, l’infarctus du myocarde provoque généralement des douleurs oppressantes dans la poitrine qui peuvent s’étendre à la mâchoire, au bras gauche ou aux deux bras, ainsi que des essoufflements à l’effort. Certains patients, en particulier les femmes, présentent des symptômes plus atypiques comme des nausées et des vomissements, des difficultés à respirer et une sensation d’épuisement.
Des études ont montré que la moitié des femmes victimes d’un infarctus n’avaient pas ressenti les symptômes retrouvés classiquement chez les hommes.
« Nous ne savons pas pourquoi ces signes ont été manqués, et c’est pour cette raison que nous avons besoin de mener des travaux plus détaillés avant de modifier le protocole de prise en charge », explique le Pr Majid Ezzati, co-auteur de l’étude.
Outre la nécessité d’émettre de nouvelles recommandations médicales, cette étude souligne également l’importance de la prévention et des campagnes de sensibilisation du grand public. Depuis leur absence des radios et télévision française, Le délai d’appel après les premiers symptômes s’est remis à augmenter, révélait le Pr Danchin à Pourquoi docteur, cardiologue à l’Hôpital Européen Georges-Pompidou.
Selon ses travaux présentés lors d’un congrès en janvier dernier, la moitié des patients attendent 90 minutes avant d’appeler les secours. Une vraie perte de chances, car plus les malades attendent pour être pris en charge, plus le muscle cardiaque nécrose. Les conséquences à long-terme pour les victimes sauvées peuvent alors être lourdes.