C'est un document choc pour le monde médical. Le docteur Valérie Auslender, médecin généraliste attachée à Sciences Po dévoile dans Omerta à l'Hôpital (Michalon Editeur) les maltraitances subies par les étudiants en santé. Afin de réaliser cet ouvrage, Valérie Auslender a rassemblé près de 130 témoignages d'étudiants médecins et infirmiers, mais aussi kinés, sages-femmes, pharmaciens, orthophonistes et aides-soignants, victimes de maltraitances de la part de leur hiérarchie.
Et ce qu'ils rapportent fait froid dans le dos « Il s'agit d'harcèlement moral, de violences physiques et sexistes, mais également de négation de droits fondamentaux comme aller aux toilettes ou l'interdiction de s'asseoir pendant une réunion », explique le docteur Auslender à France Info. « Ces souffrances ont des conséquences dramatiques sur la santé physique et psychique des étudiants de santé. Ils décrivent des symptômes dépressifs, voire des dépressions qui mènent parfois à des tentatives de suicides. »
14 % des étudiants en médecine reconnaissent avoir déjà eu des pensées suicidaires
Ces témoignages viennent confirmer une enquête menée par le conseil national de l’Ordre des médecins au printemps 2016. Selon celle-ci, 40 % des étudiants en médecine et des jeunes médecins interrogés estimaient avoir été touchés par un « épuisement émotionnel ». En outre, près d’un quart (23,5 %) qualifiait leur état de santé de mauvais ou moyen, et 14 % reconnaissaient avoir déjà eu des pensées suicidaires.
En 2013, l'unique enquête nationale réalisée auprès de 1472 étudiants en médecine avait montré que plus de 40 % d'entre eux avait été confrontés personnellement à des pressions psychologiques, 50 % à des propos sexistes, 25 % à des propos racistes, 9 % à des violences physiques et près de 4% à du harcèlement sexuel.
Pour Valérie Auslender, interrogé par 20 minutes, ce malaise des étudiants en santé est la résultante « du tournant gestionnaire de l’hôpital il y a quelques années, qui a aggravé les nouvelles techniques de management valorisant la productivité au détriment de la qualité des soins ».
Que faire pour mettre fin à ces violences ? « Il faut rompre la loi du silence. Les étudiants doivent dénoncer ces violences de façon systématique pour que les agresseurs soient condamnés », explique-t-elle. Espérons que son livre donnera le courage aux victimes de ces harcèlements de témoigner.